Arrêt du 7 juin 2018, délégation volontaire, sous-traitance, ancien article 1275 du Code civil, délégation de paiement, contrats de prestations de services, inexécution du contrat, ordonnance du 10 février 2016, délégation imparfaite, arrêt du 25 février 1992, article 1336-2 du Code civil, inopposabilité des exceptions
Dans cette affaire, un maître d'ouvrage avait confié des travaux de rénovation d'un immeuble à une entreprise (entrepreneur principal délégant). Ce dernier a décidé de sous-traiter les menuiseries extérieures à une autre société. S'est alors mise en place une délégation de paiement au profit de la société sous-traitante de la part du maître de l'ouvrage (délégué), celui-ci a donc versé des acomptes à la société pour qu'elle réalise les prestations convenues.
Le maître de l'ouvrage décide d'assigner en restitution l'entreprise sous-traitante (délégataire) estimant avoir réglé des acomptes pour des prestations n'ayant pas été exécutées.
[...] d'opposer au sous-traitant des exceptions tirées de son contrat avec l'entrepreneur principal », ainsi elle vient affirmer que les exceptions tirées du rapport du délégant avec le délégué sont inopposables du fait qu'il s'agit d'un nouvel engagement. L'échange de consentement qui a été opéré entre le délégué et le délégataire rends le droit de ce dernier propre à lui-même. Il est donc indéniable que le délégataire puisse ignorer toute révocation, ou modification du droit qu'il a convenu avec le délégué, en dehors de son propre consentement. [...]
[...] Pourtant, la Cour de cassation a affirmé la même solution que la cour d'appel sur ce point en affirmant que « Le délégué ? ne peut opposer au délégataire aucune exception tirée de ses rapports avec le délégant », solution également reprise par l'ordonnance du 10 février 2016, en son article 1336 alinéa 2 du Code civil qui précise que « Le délégué ne peut, sauf stipulation contraire, opposer au délégataire aucune exception tirée de ses rapports avec le délégant ». [...]
[...] N'aurait-elle pas ainsi fait une interprétation restrictive de l'ancien article 1275 du Code civil, qui finalement ne réglait pas la solution du problème. Il faut en revanche remarquer que l'arrêt a été rendu peu après l'entrée en vigueur de la réforme du 10 février 2016, il est alors légitime de penser que la Cour de cassation a réglé les discordances qui pesaient sur l'ancien article 1275 du Code civil à la lumière du nouvel article 1336 alinéa 2. Ce qui est certain c'est que la délégation ne semble pas être une opération juridique très favorable au délégué, qui se retrouve sans aucun recours possible alors même que le doctrine l'avait préconisé dans certains cas. [...]
[...] En revanche, en cas de délégation imparfaite les choses se compliquaient puisque la doctrine considérait que les exceptions auraient dû être applicables. Initialement, et dans le cadre de notre arrêt, c'est la distinction entre délégation certaine et incertaine qui expliquait la divergence de jurisprudence entre les chambres civiles et la chambre commerciale de la Cour de cassation. Dans la délégation certaine il y a création d'une nouvelle obligation pour le délégué, l'inopposabilité se justifiait alors comme une garantie autonome mais dans le cadre d'une délégation incertaine le délégué s'oblige envers le délégataire à payer ce que lui doit le délégant ou ce que lui-même doit au délégant, il semble logique de lui permettre d'opposer les exceptions inhérentes à la dette du délégant qui est devenue en quelque sorte sa dette. [...]
[...] Elle justifie sa décision sur le fait qu'en dehors de toute délégation l'entrepreneur principal aurait lui-même contester les factures auprès du sous-traitant, ainsi le délégué était recevable à contester lui-même les factures. La société sous-traitante forme alors un pourvoi en cassation. La question qui a été posée à la troisième chambre civile de la Cour de cassation était de savoir quelles exceptions que le délégué pouvait opposer au délégataire. La Cour de cassation casse et annule la décision rendue en appel au visa de l'article 1275 (ancien) du Code civil, la Cour d'appel a selon elle fait une application erronée de cet article. [...]
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