Arrêt du 26 mai 2006, bien immobilier, donation partage, pacte de préférence, dommages et intérêts, théorie de l'exécution forcée, publicité foncière, indemnités d'éviction
En l'espèce, un bien immobilier a été attribué par un acte de donation-partage dressé le 18 décembre 1957 et contenant un pacte de préférence. Par une nouvelle donation-partage datant de 1985 et rappelant le pacte de préférence, une parcelle dépendant du bien est transmise à une société. Le nouveau propriétaire du bien vend la parcelle à une SCI, sans en informer préalablement, comme l'exige le pacte, son bénéficiaire. Ce dernier demande aux juridictions la substitution dans les droits de l'acquéreur et, à titre subsidiaire, des dommages-intérêts. Les juges du fond font droit à sa demande subsidiaire de dommages et intérêts mais n'accèdent pas à sa demande de substitution ; il forme alors un pourvoi en cassation en avançant le fait, d'une part, qu'aucune opposition à son exécution forcée ne pouvait être avancée au vu de la nature de l'obligation et, d'autre part, que le tiers connaissait le pacte eu égard à la publicité foncière effectuée.
[...] Ce n'est pas au bénéficiaire d'apporter cet élément de preuve, car c'est le principal intéressé. Dans le conflit d'intérêts entre le bénéficiaire et le tiers acquéreur, la Cour de cassation a tranché en faveur du tiers : il est protégé, à moins qu'il ne soit prouvé qu'il avait bel et bien connaissance des intentions du bénéficiaire. Cependant si le bénéficiaire a accepté d'avoir une préférence - le pacte est un contrat c'est bien qu'il était, en principe, intéressé par le pacte. À la suite de cet arrêt, la doctrine - après étude de la portée de cet arrêt - avait soulevé une interrogation relative à la réalisation forcée de la vente après une promesse unilatérale de vente que le promettant ne veut plus tenir en s'interrogeant sur l'intérêt, au vu du présent arrêt, de continuer à exclure toute exécution forcée. [...]
[...] L'arrêt affirme très clairement que la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence dans les droits du tiers acquéreur n'est plus exclue. L'efficacité du pacte de préférence en sort considérablement renforcée, car le bénéficiaire peut ainsi obtenir satisfaction et n'aura plus à se contenter de dommages-intérêts. Le promettant, de son côté, sera sanctionné comme il se doit et ne pourra plus se débarrasser de celui avec qui il aurait dû, normalement, faire affaire. D'une manière plus générale, l'arrêt restaure la confiance dans le droit des contrats. [...]
[...] Mais lorsque le débiteur passe outre ce préalable, on voit mal comment le bénéficiaire pourrait se protéger. Dès lors l'évolution de la jurisprudence est donc moins importante qu'elle n'y paraît puisque comme le démontre l'arrêt, les magistrats du Quai de l'Horloge approuvent la décision des juges du fond - qui avaient retenu qu'il n'était pas démontré que la société savait que le bénéficiaire du pacte avait l'intention de se prévaloir de son droit de préférence - au motif que la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit du bénéficiaire L'une des solutions peut provenir d'une meilleure rédaction des pactes de préférence : on pourrait imaginer que le débiteur ait à notifier par avance au bénéficiaire son projet de vente ou de cession et ériger cette formalité en condition de la vente ou de la cession ? [...]
[...] Peut-être, mais ce montant ne sera pas nécessairement suffisant, d'autant que les dommages-intérêts sont alloués pour réparer le préjudice subi par la victime et non pas pour punir l'auteur de la faute. Or, ce que souhaite le bénéficiaire du pacte, c'est de pouvoir acquérir le bien en cause, naturellement s'il le peut. La substitution dans les droits du tiers acquéreur est donc la sanction la plus appropriée. B. L'éviction du tiers La sanction qu'est la substitution conduit à l'éviction d'un tiers qui, a priori, n'a pas à subir ni à profiter d'un pacte auquel il est étranger (art 1199 C. civ nouv.). D'où les exigences posées ou, plus exactement rappelées (Cass. [...]
[...] Cour de cassation, chambre mixte mai 2006 - La substitution du bénéficiaire dans les droits du tiers contractant est-elle possible ? Par un arrêt rendu le 26 mai 2006, la chambre mixte, composée des première et troisième chambre civiles, de la chambre commerciale et de la chambre sociale, opère, s'agissant de la sanction de la violation du pacte de préférence, un revirement. Cet arrêt pose les jalons de ce qu'allait devenir, en partie, le nouvel l'article 1123 du Code civil, notamment s'agissant de la sanction de l'inexécution du pacte de préférence. [...]
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