Droit du cadavre, principe d'intégrité du corps humain, dignité de la personne humaine, volonté du défunt, dispositions testamentaires, consentement, CPC Code de Procédure Civile, Code du patrimoine, inviolabilité du corps humain, non-patrimonialité du corps humain, arrêt du 16 septembre 2010, arrêt du 22 juin 2004, licéité du testament, arrêt Félix, arrêt Morsang sur Orge, plaidoirie fictive
Dans une petite ville de France, un illustre professeur M. Martin de droit civil reconnu pour son professionnalisme, considéré comme l'un des meilleurs enseignants du pays, et beaucoup apprécié et applaudi par ses étudiants est un des célèbres opposants au projet de réforme de responsabilité civile dont la virulence de ses articles doctrinaux a fait frémir plus d'un universitaire.
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Gaulois réfractaire du projet de la réforme de la responsabilité civile, il est très fier de son tatouage qui symbolise le combat de toute une carrière. Pour soutenir ses propos à l'encontre du projet de réforme, il annonce à ses étudiants en amphithéâtre le 2 mai 2018 qu'il souhaite que la peau de son ventre portant le tatouage vienne compléter la collection du petit musée de droit appartenant à la faculté. La semaine suivante, il meurt, s'étouffant alors qu'il donne cours sur l'ancien article 1382.
Sa très jeune femme, Mme Lepetit, une de ses étudiantes à laquelle il s'est marié secrètement en janvier, hérite de tout.
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L'euphorie collective est de courte durée. Une association, spécialisée dans la défense des droits des cadavres, assigne Mme Lepetit en Justice, pour atteinte à la dignité humaine.
[...] » La jurisprudence (Req nov. 1867) est venue préciser qu'« une disposition de dernière volonté formulée de manière orale se trouve entachée de nullité. » En l'espèce, le Professeur Martin a annoncé à ses étudiants, oralement en amphithéâtre le 2 mai 2018 à l'occasion d'un cours sur l'ancien article 1382, sa volonté de voir son ventre tatoué compléter la collection du petit musée appartenant à la faculté. En conséquence, le testament du Professeur Martin est entaché de nullité dans la mesure où les dispositions du Code civil ne prévoit que trois formes de tester, toutes trois écrites. [...]
[...] Droit des cadavres « 1382 est mort, vive 1240 » seraient tentés de dire les partisans de la réforme du droit des contrats entrée en vigueur le 1er octobre 2016. En réalité, la disparition de l'ancien article 1382 nous conduit aujourd'hui, non pas à célébrer le début d'une nouvelle ère pour le Code civil, mais à perpétuer les valeurs qu'il est censé protéger. En effet, il est question d'aborder devant votre juridiction le respect de la dignité humaine. Étroitement lié à la question de la définition de l'humanité, le concept de dignité humaine, sans cesse redécouvert et réinterprété dans les grands moments de l'histoire, devient à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'axiome fondateur des droits de l'homme et de la démocratie. [...]
[...] Une somme de 5 euros est toutefois demandée aux personnes souhaitant admirer l'?uvre faisant l'objet de la présente discussion. En tout état de cause, l'exposition du ventre du Professeur Martin est assimilable à une exposition commerciale dans la mesure où une somme est demandée. Par conséquence, cette exposition de cadavres à des fins commerciales méconnaît le principe de respect de la dignité humaine tel que rappelé par la jurisprudence de la Cour de cassation. La partie adverse pourrait invoquer à son tour une jurisprudence selon laquelle si l'article 16- 1 du Code civil exclut la patrimonialité du corps humain, il ne fait pas obstacle à l'application à un vestige humain figurant dans une collection d'un musée national de l'article L. [...]
[...] Cette notion a été précisée par la jurisprudence judiciaire mais également administrative. Dans une première décision dite « Commune de Morsang sur Orge » en date du 27 octobre 1995, le Conseil d'État a opté pour une vision objective de la notion de dignité. La dignité ne peut être considérée comme propre à chacun, puisqu'elle constitue une représentation de l'humanité qui est unique. Cette conception est confirmée par une seconde décision rendue par l'ordre judiciaire le 28 mai 1996 où le refus de concevoir le droit à la dignité de manière subjective transparaît également. [...]
[...] En réalité, le Tribunal ne se laissera pas duper par cet argument. En effet, la position du Professeur Martin, au sujet du projet de réforme, ne permet pas de déduire sa volonté prononcée à l'occasion d'un cours magistral. Dans ces lieux, il existe une grande liberté de parole des professeurs et certainement une part d'exagération dans le développement de leurs idées. En tout état de cause, si le Tribunal considère le testament du Professeur Martin valable, il ne pourra cependant pas faire abstraction de la méconnaissance de sa volonté au principe de respect de la dignité humaine. [...]
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