Loi anti-casseur, liberté d'expression, liberté de manifester, mesure administrative, ordre public, Conseil constitutionnel, Gilets jaunes, liberté individuelle
Le 12 mars dernier, le Parlement a définitivement voté le texte contenant la proposition de loi contre les casseurs dans le cadre de manifestations publiques. Ce texte de loi a été repris à son compte par le gouvernement dans le contexte des manifestations des gilets jaunes, au sein desquelles différents groupes extrémistes de casseurs se sont infiltrés pour détruire et agresser.
L'esprit de cette proposition de loi était donc de lutter contre cette nouvelle forme de violence, exercée en groupe, à visage masqué, et de proposer des dispositifs à la fois préventifs et répressifs. Malgré ces objectifs, le texte de la proposition de loi a été fortement critiqué, car contenant des mesures apparemment excessives au regard des droits et des libertés individuelles, comme, par exemple, les interdictions préventives de manifester, les fouilles préventives avant l'entrée sur les lieux de manifestation, l'instauration d'une responsabilité civile collective ou l'instauration d'un délit de dissimulation du visage.
[...] En effet, depuis sa décision « Liberté d'association » de 1971, qui a prononcé, pour la première fois, la valeur constitutionnelle du préambule de la Constitution de 1958, le Conseil constitutionnel s'est érigé en protecteur des droits et libertés des citoyens et est garant de l'État de droit. Son contrôle a priori, c'est-à-dire, avant la promulgation de la loi, permettra ainsi de vérifier la constitutionnalité du texte voté, d'en modifier éventuellement les aspects portant atteinte aux droits et libertés constitutionnellement garanties, et d'en épurer les dispositions totalement abusives. Cette ultérieure démarche peut seulement profiter à un texte qui semble être si controversé et qui ne pourrait pas, en l'état actuel, porter pleine satisfaction juridique. [...]
[...] Aujourd'hui, on élargirait ces actions aussi aux manifestations, en tant que mesure exceptionnelle. D'autres dispositions e?manent de ce texte, comme, par exemple, la mention des manifestants sur le fichier FPR. À la lumière de ce qui précède, il est alors légitime de s'interroger sur ce texte d'une manière critique, pour savoir si la loi anti-casseur constitue-elle véritablement une remise en cause des libertés constitutionnellement garanties ou si, malgré les méthodes choisies, elle permet la sauvegarde des droits et des libertés des citoyens dans une situation de violence dangereuse pour toute la communauté. [...]
[...] Une loi critiquée du point de vue substantiel : quid des libertés d'expression et de manifester ? Certaines dispositions du texte ici commenté peuvent faire l'objet de critiques en raison d'un soupçonné esprit liberticide de celles-ci, portant notamment atteinte à deux grandes libertés constitutionnelles comme la liberté expression et la liberté de s'assembler et manifester. La liberté d'expression est un droit de l'homme, un droit fondamental, stipulé à l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Il constitue une base pour les démocraties et un fondement pour tous les autres droits, parmi lesquels, également, le droit de rassemblement et de manifestation. [...]
[...] Une loi critiquée du point de vue formel : l'interdiction de manifester comme mesure administrative ? Le texte de la loi anti-casseurs peut faire l'objet d'autres critiques, non seulement car il contient des dispositions qui peuvent prévoir une limitation des libertés individuelles, mais également car ces interdictions prennent la forme de mesures administratives. Il s'agirait donc d'inscrire dans le droit commun la possibilite? pour l'autorite? administrative d'interdire de manifester des individus, ce qui pourrait se révéler tre?s inquie?tant pour la de?mocratie. La substitution de l'autorite? [...]
[...] On passerait donc d'un objectif de lutte contre la menace terroriste à l'usage de ces mesures d'exception dans le droit commun pour la poursuite d'un objectif de restriction de la liberté constitutionnellement garantie de manifester. Le caractère disproportionné résulte en outre d'une disposition rédigée en termes très imprécis que l'on pourrait craindre qu'elle soit appliquée de manière trop large à des personnes non violentes qui n'ont dès lors aucune raison d'être privées de leur droit de manifester. Notre système juridique disposant déjà de moyens de punir les actes de?lictuels commis lors des manifestations, et ce dans le respect des principes re?publicains et des liberte?s fondamentales, une telle mesure constituerait, d'un point de vue formel et procédural, un surplus législatif inutile et dangereux. [...]
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