Arrêt du 17 mai 2018, expulsion, démolition d'un bien, construction illégale, droit de propriété, droit au domicile, contrôle de proportionnalité, droits fondamentaux, ingérence
En l'espèce, des époux occupent une parcelle sur laquelle ils ont construit une maison. Ils assignent alors le propriétaire de la parcelle en revendication de la propriété par prescription trentenaire. Cependant, le propriétaire de la parcelle se prévaut de son côté d'un titre de propriété et demande l'expulsion des occupants illégaux et la démolition de la maison en invoquant son droit à l'exclusivité visé par l'article 544 du Code civil.
[...] Par conséquent, le couple forme alors un pourvoi en cassation aux moyens que le droit au domicile est une composante du droit à la vie privée dont le respect est protégé par l'article 8 de la Convention EDH et que l'ingérence dans ce droit que constitue la perte de son logement doit demeurer proportionnée au but légitime poursuivi et que par conséquent, la Cour d'appel aurait dû rechercher si les mesures qu'elle a ordonnées étaient proportionnées au regard notamment de l'ancienneté de l'occupation des lieux et de l'âge de l'occupant. La Cour de cassation a dû se demander si les mesures d'expulsion et de démolition d'un bien illégalement construit sur le terrain d'autrui sont les seules mesures de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien. Et si ces mesures constituent une ingérence au droit du domicile de l'occupent illégitime de la parcelle. [...]
[...] En effet, au niveau national, l'article 34 de la Constitution française dispose que la loi est compétente pour déterminer les principes fondamentaux du régime de la propriété. L'article 2 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC) énumère les droits naturels et imprescriptibles de l'Homme dont la propriété. L'article 17 de la DDHC dispose que le droit de propriété est un droit inviolable et sacré dont nul ne peut être privé sauf en cas de nécessité publique. [...]
[...] Cour de cassation, 3e chambre civile mai 2018, n°16-15.792 - Les mesures d'expulsion et de démolition d'un bien illégalement construit sur le terrain d'autrui sont-elles les seules mesures de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien ? TD 4 Commentaire d'arrêt : Cass. civ. 3e mai 2018, n°16-15.792 D'après Nicolas Damas, Maitre de conférences à l'université de Lorraine : « le droit de propriété doit être protégé contre toute occupation illicite, et l'expulsion est le moyen d'action privilégié pour garantir l'effectivité de cette protection. ». [...]
[...] Ainsi, la Cour de cassation a dû se prononcer sur la proportionnalité des mesures contestées à leur compatibilité avec des Droits fondamentaux différents impliquant respectivement des solutions contraires. Elle a dû apprécier le juste équilibre entre le droit au respect des bien et le droit au respect de la vie privée du domicile pour déterminer s'il y a bien une ingérence. La Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), dans un arrêt rendu en grande chambre le 30 juin 2005, considère « qu'il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé par toute mesure privant une personne de sa propriété ». [...]
[...] Le juge doit évaluer la portée de l'atteinte à la protection d'un Droit fondamental consécutive à l'application de la règle de droit. S'il y a bien une atteinte excessive, le juge neutralisera l'application de cette règle au profit du Droit fondamental. Par son contrôle de proportionnalité, la Cour de cassation reconnait une ingérence du droit au domicile. Cependant, les intérêts du droit de propriété sont plus fort et plus important à protéger. Elle justifie, de ce fait, l'ingérence par la nécessité de protéger le droit de propriété du propriétaire La justification de l'ingérence par la nécessité de protéger le droit de propriété Dans sa solution, la Cour de cassation justifie l'ingérence au droit au domicile en se fondant sur l'article 544 du Code civil selon lequel « le propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements » et sur l'article 545 du même code selon lequel « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité ». [...]
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