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Résolution de l'ONU pour le retrait des troupes russes et abstention de certains États

Le mercredi 2 mars dernier, l'Assemblée générale des Nations Unies s'est réunie et a adopté une résolution en faveur d'un retrait des troupes russes du territoire ukrainien, déplorant l'agression militaire perpétrée par la Fédération de Russie sur le territoire d'un autre Etat.

Résolution de l'ONU pour le retrait des troupes russes et abstention de certains États

Credit Photo : EyePress News/Shutterstock

Ce vote est pour nous l’occasion de revenir sur la notion de résolution, mais aussi de nous intéresser à la question de savoir pourquoi de si nombreux Etats africains ont décidé de s’abstenir.


Une résolution de l’ONU : qu’est-ce que c’est ?

D’après une définition donnée par l’Organisation des Nations Unies (ONU), une résolution constitue une expression formelle non seulement de l’opinion mais également de la volonté des organes de l’ONU, intéressant la plupart du temps des questions de fond. Par opposition, une décision constitue une action formelle également prise par ces mêmes organes mais intéressant, pour leur part, des questions de procédure ; une décision peut enfin être prise afin d’enregistrer l’adoption d’un texte qui contient le consensus des membres d’un organe donné.
Résolution et décision disposent d’un statut juridique identique. Hormis les décisions inhérentes aux paiements aux budgets ordinaires et de maintien de la paix, résolutions et décisions de l’Assemblée générale ne sont pas contraignantes pour les Etats, l’instauration des recommandations de nature politique qui y sont insérées incombant à chaque Etat membre de l’ONU.


Un vote massif en faveur d’un retrait des troupes russes

Le 2 mars 2022, l’Assemblée générale a voté massivement en faveur d’un retrait des forces armées russes du territoire ukrainien – en effet, 141 Etats ont voté pour, 5 contre (dont la Russie, la Syrie, le Bélarus, la Corée du Nord et l’Erythrée), et 35 se sont abstenus. Cette résolution, non contraignante juridiquement mais disposant d’un fort impact politique, est intervenue quelques jours seulement après l’invasion militaire de la Russie sur le sol de l’Ukraine et après que celle-ci ait opposé son droit de véto relativement à un projet de résolution du Conseil de sécurité dont elle est membre permanente. Ce projet regrettait aussi cette invasion armée.


Que comprend globalement cette résolution ?

Cette résolution intervient pour réaffirmer l’engagement de l’Assemblée générale « envers la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité » de l’Ukraine « à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues » (§1 de la résolution). Elle comprend également le regret de la violation de l’article 2, §4, de la Charte des Nations Unies disposant notamment que les Etats doivent s’abstenir d’employer la force « soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout Etat ». Enfin, elle « exige que [la Russie] cesse immédiatement d’employer la force contre l’Ukraine » (§2) et retire sans délai et sans condition l’ensemble de ses forces armées du territoire ukrainien (§4).
Toutefois force est de constater que de nombreux Etats, ont décidé de s’abstenir de tout vote. Parmi eux, la moitié des Etats sont africains. Comment expliquer cette abstention ?


Une abstention notable : celle de nombreux Etats africains, pourquoi ?

16 Etats africains ont décidé de s’abstenir parmi l’ensemble des Etats abstentionnistes. Néanmoins il convient ici de noter que 8 autres Etats du continent ont aussi décidé de déguiser, d’une certaine manière, leur abstention en ne siégeant pas, le jour du vote à l’Assemblée générale. Cela représente un total de 24 Etats abstentionnistes sur 54 Etats que compte l’Afrique, soit près de la moitié.


Pourquoi un tel refus de leur part ? Plusieurs facteurs l’expliquent selon Thierry Vircoulon de l’Université de Paris.

  • Tout d’abord, la Russie dispose actuellement d’une influence forte en Afrique notamment dans des secteurs précis comme la vente d’armes, la fourniture de prestations de sécurité ou l’alimentation. La Fédération de Russie a en effet su se montrer indispensable dans l’approvisionnement de blé en direction d’Etats africains fortement dépendants d’un point de vue alimentaire notamment. De même dans le secteur de la sécurité, entre 2016 et 2020, 30% des armes acquises par les Etats d’Afrique subsaharienne l’ont été auprès du Kremlin (contre 7% seulement entre 2010 et 2017).
  • De plus, ces abstentions peuvent se comprendre à l’aune d’un changement de politique dans de nombreux Etats africains. En effet, depuis une dizaine d’années maintenant est observable, sur l’ensemble du continent, un certain retour à l’autoritarisme s’opposant au souffle démocratique de la fin des années 1990.  Ce choix permet ainsi un rapprochement de ces Etats en faveur de grandes puissances autoritaires, à l’image de la Russie. Ce rapprochement s’opère dans les faits par une prise de distanciation avec l’Occident, d’autant plus que les pays démocratiques ont pu, de manière purement sélective et sûrement de manière maladroite, procéder dans les dernières années à l’instauration de condamnations diplomatiques (le régime militaire d’Egypte n’a pas été sanctionné de la même manière que le gouvernement guinéen, par exemple). Il faut cependant préciser que ce constat d’affinités politiques n’est pas automatique ni dogmatique puisque certains régimes dictatoriaux comme celui du Rwanda ont voté en faveur de la résolution tandis que des Etats considérés comme démocratiques, à l’image du Sénégal, se sont abstenus.
  • Enfin cette abstention, ce refus d’alignement de près de la moitié des Etats africains s’expliquerait par leur nécessité d’importer des produits de l’étranger. Face à ces dépendances multiples de nombreux pays africains, ces derniers ont progressivement mis en place une stratégie visant notamment à mettre en concurrence leurs partenaires économiques (que ces derniers soient américains, européens ou asiatiques). Pour Thierry Virculon, cette différenciation de partenaires serait de nature sécuritaire et politique plus encore qu’économique. Selon lui, il est actuellement observable une re-polarisation du monde en deux camps. Ces Etats africains sont en fin de compte contraints de procéder à des choix politiques et diplomatiques, du fait même de cette dépendance de l’étranger. Ces choix se sont notamment exprimés par cette abstention dans le vote de la résolution susmentionnée.


Références
https://ask.un.org/fr/faq/14641
https://unric.org/fr/lonu-exige-le-depart-des-forces-russes-dukraine/
https://news.un.org/fr/story/2022/03/1115472
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/03/03/resolution-a-l-onu-contre-la-guerre-en-ukraine-qui-a-vote-pour-ou-contre-et-qui-s-est-abstenu_6115936_4355770.html#:~:text=L'Assembl%C3%A9e%20g%C3%A9n%C3%A9rale%20des%20Nations%20unies%20a%20adopt%C3%A9%2C%20mercredi%202,193%20membres%20que%20compte%20l'
https://theconversation.com/la-russafrique-combien-de-votes-178913

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