Que dit le droit en matière d’information à ce sujet ?
À partir du moment où un salarié est reconnu inapte par un médecin du travail, l’employeur doit respecter son obligation de reclassement, peu importe, que l’inaptitude du salarié soit la conséquence d’une maladie ou bien d’un accident d’origine professionnel ou non.
Ceci signifie, en d’autres termes, que l’employeur est contraint de lui proposer un emploi qui correspond à ses capacités - ceci peut, par exemple, passer par un aménagement du temps de travail du salarié.
Toutefois, lorsque l’employeur ne peut pas reclasser le salarié, il doit l’en informer. Il s’agit d’une obligation spéciale. C’est la combinaison des dispositions des articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du code du travail qui obligent l’employeura informé par écrit le salarié, les motivations qui s’opposent à son reclassement. Cette information doit obligatoirement intervenir avant que la procédure de licenciement pour inaptitude soit engagée (cf. Cass. soc., 26/05/1994, n-91-41.446). Si l’employeur méconnait cette obligation, le salarié étant droit de demander des dommages et intérêts.
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Quid de la possibilité de dispense de l’employeur à ce sujet ?
La loi prévoit que l’employeur peut mettre un terme à une relation contractuelle sans qu’il n’ait à rechercher à reclasser le salarié. Ce sont les dispositions des articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du code du travail qui le lui permettent. Ce sont donc plusieurs hypothèses qui autorisent l’employeur à licencier le salarié s’il motive son impossibilité de lui proposer un emploi de reclassement, ou pour le cas où le salarié refuse l’emploi de reclassement qui lui est proposé, ou lorsque l’avis effectivement émis par le médecin du travail que le maintien du salarié dans un emploi serait de nature, préjudiciable à sa santé, ou que son état de santé ne permet pas de reclassement dans un emploi. Le cas d’espèce ici jugé et rapporté par la Cour de cassation intéresse ce dernier point.
Que signifie cette dispense médicale pour l’employeur ?
À partir du moment où il est mentionné dans l’avis du médecin du travail que le maintien du salarié dans un emploi contreviendrait à sa santé de manière grave et préjudiciable, l’employeur n’est pas contraint par la recherche d’un reclassement. Ceci s’explique par le fait qu’il n’est pas attendu que l’employeur agisse dans un sens contraire à ce que l’avis du médecin contient (cf. en ce sens, Cass. soc., 12/06/2024, n-22-18.238).
Qu’ont décidé les juges de la Chambre sociale de la Cour de cassation en l’espèce ?
Dans notre cas d’espèce ici jugé et rapporté par la Chambre sociale de la Cour de cassation, il s’agissait d’une salariée qui a fait l’objet d’une déclaration d’inaptitude par un médecin du travail. Comme précisé ci-dessus, l’avis précise que le maintien dans un emploi serait préjudiciable à l’état de santé de la salariée et que cet état empêche toute tentative de reclassement.
Mécontente de la décision de mettre un terme à la relation de travail, la salariée a décidé de saisir le Conseil des prud’hommes. Elle a considéré que l’employeur aurait dû lui faire savoir par écrit les motivations qui l’ont poussé à ne pas la reclasser avant que la procédure de licenciement pour inaptitude ne soit actionnée par lui. Celle-ci lui reprochait également ne pas avoir recherché à la reclasser au sein des autres établissements de l’entreprise.
La salariée a été déboutée de sa demande et ce choix opéré par les juges du fond fut également celui choisi par la Chambre sociale de la Cour de cassation. Les juges de la Haute cour ont retenu qu’à partir du moment où l’avis d’inaptitude émis par le médecin du travail comprenait la mention selon laquelle le maintien de la salariée dans un emploi revêtirait les caractères susmentionnés, l’employeur n’était pas contraint par la recherche d’un poste de reclassement de la salariée au sein des autres établissements de l’entreprise.
Au-delà, les juges ont retenu que l’employeur n’avait pas à notifier, par écrit, à la salariée les motivations qui s’opposaient à son reclassement avant que ne soit finalement actionnée la procédure de licenciement pour inaptitude.
Cette décision se comprend dans la mesure tout salarié est au préalable informé du caractère impossible de reclassement le concernant, suite à l’avis d’inaptitude du médecin du travail, conformément aux dispositions contenues au sein de l’article R.4624-55 du code du travail. Il n’apparaît donc pas nécessaire d’imposer à l’employeur l’obligation de notifier les motifs qui s’opposent au reclassement en cause, celui-ci n’étant pas possible pour des raisons médicales, attestées par le médecin du travail.
Finalement cette décision se comprend à l’aune des dispositions contenues au sein des articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du Code du travail, susmentionnés, au regard de l’obligation d’information. Celle-ci trouvera maintenant à s’appliquer, suite à cet arrêt, lorsque l’employeur ne peut proposer un autre emploi de reclassement lorsque l’organisation de l’entreprise ne le permet pas, ou qu’aucun poste ne peut être proposé par rapport à l’état de santé du salarié. Ladite obligation ne saurait donc concerner les cas de dispense médicale, comme tel est le cas en l’espèce ici jugé et rapporté par la Chambre sociale.
Références
https://www.courdecassation.fr/decision/684912ce73d71a3e1cc31e41
https://www.editions-tissot.fr/droit-travail/content.aspx?idSGML=1c701909-0431-4e0b-94b3-47b2467796b3&codeSpace=PSI&chapitre=P09C3&pageNumber=9§ion=P09C3F080&op=1&codeCategory=PME
https://ledroitdutravail.over-blog.com/2025/06/avis-du-medecin-du-travail-et-impossibilite-de-reclassement-dans-tout-emploi-soc.11-juin-2025-n-24-15.297.html