Propos introductifs
La décision du Conseil constitutionnel sur ce texte était particulièrement attendue. C’est maintenant chose faite depuis le 19 juin 2025. Et cette décision, autant que ce texte, a déjà fait couler beaucoup d’encre aussi bien du côté de ses détracteurs que de ses défenseurs. Dans tous les cas, il a été décidé par les Sages du Conseil constitutionnel de considérer certaines dispositions comme étant incompatibles avec les principes spéciaux de la justice des mineurs.
C’est donc en ce sens que 6 articles ont été censurés par le Conseil constitutionnel alors que ces derniers constituaient le corps de la proposition de loi de réforme, portée par l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal. Pour rappel, ce texte avait été initialement adopté par le Parlement au printemps 2025. Il avait notamment pour ambition de ne plus appliquer en droit français le principe de l’atténuation des peines pour les mineurs. À l’égard de cette règle proposée, de même que pour les autres dispositions censurées, les juges du Conseil constitutionnel ont retenu que ces dernières contreviennent « aux exigences en matière de justice des mineurs ». Il est sûrement intéressant de noter, concernant ces dispositions litigieuses partiellement ou intégralement censurées, que l’on retrouve la création de la procédure de comparution immédiate pour les mineurs récidivistes, de même que la création de la procédure d’audience unique.
Une décision à la fois saluée et critiquée
Cette décision était fortement attendue tant par les défenseurs que les détracteurs de ce texte. Ainsi, faisant suite à la publication de la décision, Gabriel Attal et le rapporteur du texte, Jean Terlier, se sont émus de son contenu, considérant notamment que pour éviter toute censure du Conseil constitutionnel « c’est de ne rien faire ». Le communiqué précise également que les auteurs de la proposition de loi « [n’abandonneront] jamais [leur] combat pour la jeunesse et l’apaisement de notre société », et ajoute qu’un texte nouveau était actuellement en cours d’écriture afin de tenir compte de la décision ainsi rendue et éviter dans le futur une nouvelle censure. Par ailleurs, ayant donc pris acte de cette décision, Gabriel Attal a précisé que celle-ci censure les modalités d’application des mesures visées, mais pas leur principe. Ceci doit donc permettre de rédiger de nouvelles mesures qui, grâce aux précisions apportées dans la décision, permettront de les voir validées sur le plan constitutionnel.
Le Conseil constitutionnel avait été saisi à l’issue du vote de ce texte controversé au sein du Parlement par des députés de la gauche (LFI, socialistes et écologistes), ces derniers considérant le texte et ses dispositions comme étant contraires aux principes de la justice des mineurs. Notons que ce texte, voté au Parlement, était également soutenu par Gérald Darmanin, le ministre de la justice. Les députés avaient notamment réclamé au Conseil constitutionnel de censurer la disposition relative à l’excuse de minorité.
Il est également intéressant de revenir sur le vote du texte au Parlement. En effet, la gauche était majoritairement opposée à ce texte et les parlementaires détracteurs étaient soutenus par de nombreux professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse. Ces derniers s’opposaient en effet au texte qui ne constituait rien d’autre qu’une violation de la justice des mineurs et de ses principes fondateurs et donc la prévalence nécessaire de l’éducation et non la répression (systématique ou presque).
Quid de l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs, et des autres mesures clés ?
Ce texte, si controversé chez les professionnels et parmi la population, indiquait que le principe de l’atténuation des peines, concernant les mineurs de plus de 16 ans, en cas de récidive, pour les infractions punies d’au moins 5 ans d’emprisonnement, devienne l’exception (et non la règle). Cette règle s’inscrit effectivement dans une nette opposition par rapport au droit pénal des mineurs tel qu’actuellement appliqué. Ceci n’a cependant pas passé l’examen attentif du Conseil constitutionnel qui a retenu, à cet égard, que la disposition en cause est contraire au principe de l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs « en fonction de l’âge, [et] qui est une exigence constitutionnelle ».
Au titre des autres mesures qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel, l’on peut relever la mise en œuvre de la procédure de comparution immédiate concernant la situation des mineurs récidivistes, âgés de plus de 16 ans. Les juges ont considéré qu’il s’agit ici d’une mesure qui contrevient aux principes de la justice pénale des mineurs et qui empêcherait « le relèvement éducatif et moral » des mineurs concernés. Cette prévalence de l’éducation sur la répression constitue d’ailleurs un principe constitutionnel devant être poursuivi et respecté.
Quid enfin de la situation des parents ?
Toutes les mesures n’ont pas été censurées, bien au contraire. Ainsi, par exemple, les juges ont validé la création d’une circonstance aggravante des peines qui répriment le délit de soustraction d’un parents aux obligations légales qui sont les siennes, dans l’hypothèse où elle a conduit, de manière directe, un enfant mineur à commettre une infraction (qu’il s’agisse d’un délit ou bien d’un crime).
Cette victoire a été soulignée par Gabriel Attal qui a déclaré que la décision rendue par le juge constitutionnel suprême a validé une part importante du texte à l’égard de « la responsabilité parentale en matière de délinquance des mineurs ».
Références
https://www.conseil-constitutionnel.fr/actualites/communique/decision-n-2025-886-dc-du-19-juin-2025-communique-de-presse
https://www.lefigaro.fr/actualite-france/la-loi-attal-visant-a-durcir-la-justice-des-mineurs-largement-censuree-20250619
https://www.nouvelobs.com/justice/20250619.OBS105113/le-conseil-constitutionnel-censure-plusieurs-articles-cles-de-la-loi-attal-sur-la-justice-des-mineurs.html
https://www.liberation.fr/societe/police-justice/justice-des-mineurs-le-conseil-constitutionnel-censure-plusieurs-articles-cles-de-la-loi-attal-20250619_WPJXXZ4TJFEXHF55GODKL64P64/