Une pénurie de carburants aux conséquences importantes pour les salariés
La pénurie de carburants qui touche maintenant l'ensemble du pays est due à un mouvement de grève dans des raffineries de deux groupes pétroliers : TotalEnergies et ExxonMobil. Pour l'heure, aucune solution n'a pu être apportée par les parties intéressées afin qu'il y soit mis fin. Dans tous les cas, la situation telle qu'elle est observable aujourd'hui se poursuivra plusieurs jours encore avant un retour à la normale.
Or cette grève a des impacts non seulement sur l'économie française, mais aussi directement sur les salariés contraints d'utiliser leur véhicule pour se rendre sur leur lieu de travail. Selon l'Insee, près de 74% des salariés français déclarent avoir besoin de leur véhicule pour se rendre au travail.
Des questions se posent alors, notamment la suivante : qu'advient-il du salarié qui ne peut se rendre autrement que par l'utilisation de son véhicule sur son lieu de travail et alors qu'il ne peut plus faire le plein de carburant ?
Pénurie de carburants et absence du salarié
Une information de taille est immédiatement à relever dans notre cas. En effet, pour le cas particulier d'une pénurie de carburants, la loi ne prévoit aucune disposition particulière au regard de la situation du salarié qui est contraint de s'absenter, faute de pouvoir se déplacer avec son véhicule sur son lieu de travail. Cette absence de disposition législative est lourde de conséquences pour ce salarié dans la mesure où, la règle générale selon laquelle le salarié ne venant pas travailler n'est pas rémunéré, s'applique à lui.
Néanmoins, il nous faut ici préciser que le fait pour un salarié de ne pas pouvoir se déplacer sur son lieu de travail, parce qu'il ne peut se déplacer autrement qu'avec son véhicule, et que cette impossibilité est due à une pénurie de carburants, ne revêt pas la nature d'une faute. Autrement dit, son absence n'est alors pas sanctionnable du fait qu'il ne s'agit pas ici d'une faute. Le salarié devra néanmoins justifier son absence auprès de son employeur. De nouveau, il nous faut préciser que la justification de son absence auprès de son employeur reste à la seule initiative du salarié : il peut justifier cette absence à l'aide de photographies de la jauge de carburant de son véhicule, par exemple. Il doit en outre expliquer la situation le plus clairement possible à son employeur.
Enfin, cette pénurie peut-elle revêtir la qualification d'un cas de force majeure ? La force majeure pourra permettre au salarié de légitimer une absence auprès de son employeur. Toutefois, la pénurie de carburants n'entre pas dans le champ d'application de cette notion de cas de force majeure. Pourquoi ? Tout simplement parce que cette notion implique l'existence d'un évènement qui se soustrait totalement au contrôle des personnes concernées ; il doit en outre être insurmontable et principalement imprévisible. Ce n'est pas le cas dans le cadre de cette pénurie puisque le mouvement de grève en cause se poursuit depuis plusieurs jours et surtout les dysfonctionnements liés à l'approvisionnement en carburants des stations-service font la une des journaux papiers et télévisés.
Une nécessaire négociation entre les parties au contrat de travail
De plus, à cause cette pénurie, il est possible au salarié d'entamer une négociation avec son employeur. Celle-ci aura pour objectif de fixer les conditions de travail futures du salarié en attendant son retour sur son lieu de travail. L'employeur pourra en outre proposer à son subordonné de prendre un ou plusieurs jours de congés payés sans toutefois être en mesure de lui imposer la prise de ces jours ; soit encore lui proposer de télétravailler dès lors que son poste le lui permet en effet. D'autres solutions pourront être proposées par son employeur, notamment le covoiturage ou encore l'utilisation des transports en commun. Ici, il est utile de souligner dans le cadre de cette négociation entre l'employeur et son salarié que ce dernier doit se montrer de bonne foi afin de proposer des alternatives en attendant que la situation s'achève.
Une seconde question se pose maintenant : qu'en est-il de la situation des salariés qui utilisent un véhicule professionnel ?
La question des salariés et l'utilisation de véhicules professionnels
Il s'agit ici de la seconde question relative à la possible absence justifiée d'un salarié, mais qui utilise dans le cadre de son travail un véhicule professionnel. Dans le cas particulier de ce salarié, il n'est alors plus question du trajet entre le domicile du salarié et son lieu de travail : le concernant, il est en effet question de son travail dit effectif. Dans cette situation, il faut en premier lieu noter qu'il revient à l'employeur de prendre en charge l'ensemble des frais de carburants. Ensuite, il convient de souligner le fait qu'il ne peut valablement choisir de ne plus rémunérer son salarié qui utilise un véhicule professionnel du fait d'une telle pénurie.
Par voie de conséquence si le salarié se trouve immobilisé parce qu'il ne peut plus faire le plein de carburant, il n'a pas d'absence à justifier auprès de son employeur. Précision importante en pareil cas : il revient à l'employeur non seulement de prendre en charge l'ensemble des autres frais du salarié (par exemple les transports utilisés par le salarié pour se rendre sur son lieu de travail).
Sources : France TV Info, les Échos, Libération