Arrêt du 19 janvier 2005, statut des baux commerciaux, activité commerciale, fonds de commerce, fonds de clientèle, autonomie de gestion
En l'espèce, en novembre 1993, la société bailleresse avait consenti à sa locataire une « convention d'occupation précaire » portant sur un local intégré dans un hôtel pour une durée de douze mois. La société bailleresse lui donne congé en septembre 2000. La locataire l'assigne en justice sur le fondement du régime des baux commerciaux, arguant qu'elle s'était maintenue dans les lieux à l'issue du terme fixé par la convention initialement conclue.
Condamnée en appel, la société bailleresse se pourvoit en cassation, avançant notamment que la locataire ne prouve pas, d'une part, qu'elle avait en permanence une clientèle propre prédominante par rapport à celle de l'hôtel, d'autre part, qu'elle avait une autonomie de gestion.
[...] Cette solution mérite d'être saluée dans la mesure où, d'une part pour son pragmatisme, la nouvelle condition étant plus adaptée à la réalité du commerçant dont l'indépendance est plus juridique qu'économique, la soumission économique ne le privant pas de sa qualité de commerçant, d'autre part, pour son surcroît de protection octroyé aux exploitants de commerce intégré, rien ne justifiant que ceux-ci bénéficient d'une protection plus incertaine que les autres exploitants. [...]
[...] La troisième chambre civile de la Cour de cassation écarte cet argument, observant que le magasin était accessible à une clientèle extérieure à celle de l'hôtel, touristes comme résidents. L'arrêt commenté confirme l'approche souple de l'arrêt de 2003 relativement à cette condition, considérant suffisant que la clientèle existe, peu importe qu'elle soit prédominante ou non par rapport à celle de l'ensemble intégrateur, la condition restant à vérifier apparaissant alors comme la plus épineuse à vérifier pour le commerce intégré, à savoir l'autonomie de gestion suffisante. [...]
[...] L'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité commerciale L'arrêt commenté procède à un revirement de jurisprudence en remplaçant pour la troisième condition cumulative un critère positif par un critère négatif plus souple et plus protecteur des exploitants de commerce intégré (B.). A. De 2003 à 2005, un revirement de jurisprudence En 2003, la Cour de cassation soumettait l'application du statut des baux commerciaux à l'autonomie de gestion. Cette condition était appréciée à l'aune d'un faisceau d'indices, portant sur les moyens matériels, voire juridiques, de l'exploitation, et sa politique commerciale. Cette condition était dès lors difficile à prouver et restrictive, conduisant souvent à l'exclusion du statut des baux commerciaux. [...]
[...] Dans l'arrêt de 2005, la Cour de cassation procède à un revirement de jurisprudence dans la mesure où elle abandonne cette condition pour celle de l'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité commerciale, aboutissant de facto à un renversement de la charge de la preuve. B. Une appréciation pragmatique du juge, d'un critère positif à un critère négatif En l'espèce, la société bailleresse arguait à l'appui de son pourvoi que sa locataire suivait les horaires d'ouverture, de fermeture et les conditions d'exploitation de l'hôtel conformément au règlement intérieur de l'hôtel et donc de facto ne disposait pas librement des lieux et ne bénéficiait pas d'une autonomie de gestion. [...]
[...] Il incombait donc à la Haute juridiction de clarifier les conditions auxquelles les commerces intégrés bénéficient du statut des baux commerciaux. Celle-ci rejette le pourvoi en relevant la réalité de la clientèle et l'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité commerciale de la locataire, justifiant dès lors l'application du régime des baux commerciaux, soumettant ce dernier à la vérification des trois conditions cumulatives dégagées en 2003, à savoir l'exploitation de locaux stables et permanents par le preneur, la détention d'une clientèle propre, et l'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de son activité. [...]
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