Arrêt du 22 juin 1999, sûreté réelle, hypothèque, filiale, société fictive, affectio societatis, fictivité, droit des sociétés
En l'espèce une société de droit russe avait besoin d'un prêt afin de financer la construction de son navire, une banque allemande n'acceptait de lui consentir ce dernier qu'à la condition qu'une sûreté réelle s'y rattache, mais en Russie les hypothèques maritimes sont impossibles.
Afin de pallier ce problème, la société a créé une filiale à Chypre, où elle détenait presque la totalité du capital (99,99%). La société chypriote s'est portée co-emprunteur, a mis le navire à son nom et a consenti une hypothèque sur ce dernier.
Ultérieurement la société russe fut condamnée à payer une somme d'argent à un créancier, celui-ci a fait procéder à la saisie-exécution du navire. À la suite de sa vente aux enchères, à la répartition du solde du prix, un différend s'éleva entre les créanciers.
[...] Une solution protectrice opposable uniquement aux tiers de bonne foi. Cette solution est favorable aux tiers, et permet que des associés malveillants ne puissent pas profiter d'une telle situation pour se défaire de leurs obligations, mais les juges ont tout de même émis une réserve en avançant « demeure valable et opposable aux créanciers chirographaires, en l'absence de fraude », si la convention d'hypothèque avait été passé dans le but de faire échec aux droits des créanciers concurrents, la fraude aurait pu être reconnu et ainsi ladite opposabilité n'aurait pu faire effet, en somme la fictivité n'est pas synonyme de fraude. [...]
[...] La cour de Cassation s'est basée en l'espèce sur des critères habituels tel que l'absence d'affectio societatis mais aussi sur des critères nouveaux notamment l'absence d'activité matérielle A. Le critère subjectif de la fictivité : l'absence d'affectio societatis La cour de Cassation a retenue en premier lieu que « dans la société Baltcy, la société Baltic a pour seul coassocié, à concurrence de des parts formant un capital insignifiant, un secrétaire d'avocat établi à Limassol (Chypre), qui n'est qu'un prête nom » La distorsion du capital, fut retenue comme une absence d'affectio societatis dans la société, bien que ce critère ne soit pas forcément la preuve d'une fictivité.2 Mais il est de jurisprudence constante que les juges prononcent la fictivité de l'entreprise lorsqu'elle ne dispose que d'un associé véritable et de prêtes noms, il faut reconnaitre que l'identité de l'associé parait douteuse surtout au regard de la réputation qu'a Chypre auprès des autres pays européens (paradis fiscal). [...]
[...] En l'espèce, les juges de la Cour de cassation ont eu à s'interroger sur la fictivité d'une société crée pour consentir une hypothèque maritime, mais également, est-ce qu'une sureté réelle consentie par une société avant qu'elle ne soit déclarée fictive demeure valable et opposable aux créanciers ? La chambre commerciale de la Cour de cassation répond par l'affirmative, casse et annule l'arrêt. Les juges de la chambre commerciale, estiment que la Cour d'appel a légalement justifié sa décision (au regard des articles 1832 et 1842 du Code civil) en déclarant la société fictive. [...]
[...] Les créanciers ont alors assigné la banque, afin de voir juger que la société Chypriote était fictive, donc par voie de conséquence que l'hypothèque était entachée de nullité et qu'elle ne pouvait leur être opposable, de ce fait la banque devait être colloqué au rang des créanciers chirographaires. En seconde instance la cour d'appel de Papeete le 26 février 1998 fait droit à leur demande. Elle estime que la filiale était fictive, d'une part par l'absence d'affectio societatis et d'autre part à cause de la confusion entre le patrimoine et les activités des deux sociétés. De ce fait, l'hypothèque consentie par la société fictive ne peut être opposée aux créanciers. [...]
[...] La nullité offre plus de sécurité juridique que l'inexistence, en effet si l'inexistence avait été retenue la sureté réelle n'aurait pu être opposable aux créanciers car c'est comme si la société n'avait jamais existé. La nullité quant à elle est plus favorable, surtout en droit des sociétés où elle ne s'applique pas de manière rétroactive (contrairement au droit commun), ainsi la banque pourra opposer sa sureté réelle aux créanciers, cette solution n'a rien de novateur et fut déjà affirmé dans l'arrêt Lumale du 16 juin 1992. [...]
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