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Le principe de « non bis in idem » en droit français

Le principe de "non bis in idem", qui existe depuis le droit romain, se définit par le fait que "nul ne peut être poursuivi ni condamné deux fois pour les mêmes faits".

Le principe de « non bis in idem » en droit français

Credit Photo : Non bis idem alvarezhernando.wordpress.com

Il fait l’objet de nombreux textes internationaux dont l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
L’article 4 du protocole 7 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (doc 21) et la Charte des Droits fondamentaux de l’UE en son article 50 (doc 6). Le droit français le reconnaît à l’article 368 du Code de procédure pénale mais sa valeur constitutionnelle est plus discutée (doc 1).
Ce principe, qui semble faire l’unanimité, est-il pour autant reconnu et appliqué de manière uniforme ?
Nous étudierons d’abord la position initiale du droit français (I) avant de chercher à montrer que sous l’influence du droit externe, cette position a évolué (II).

I. La position initiale du droit français à l’égard du principe « non bis in idem »

Le droit français reitnet un champ d’application particulier pour ce principe (A), ce qui a pu mener à certaines contradictions (B).

A. Le champ d’application du principe en droit français

Le principe « non bis in idem » a comme moyen de mise en œuvre procédurale l’exception de chose jugér (doc 11). Celle-ci fait l’objet de l’article 6 du Code de procédure pénale qui retient que l’autorité de chose jugée éteind l’action publique (doc 3).
Cela veut donc dire que le principe « non bis idem » s’applique aux jugements définitifs ce qui exclue le cas d’un jugement pour lequel les voies de recours peuvent toujours être exercées (doc 11), les décisions rendues par les juridictions d’instruction et les jugements de non-lieu si des faits nouveaux sont découverts (doc 22). Cependant le pénal lie l’action civile alors que le civil ne lie pas le pénal (doc 2). Le droit français a une conception catégorique du principe « non bis idem » puisqu’il l’écarte dans le cas où les procédures engagées sont de nature différentes, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel dans une QPC du 17 janvier 2013 (doc 1). Cela est dû au fait qu’il ne retient l’exception de chose jugée que s’il y a triple identité de cause, de parties et d’objet (doc 15), or l’objet n’est pas le même devant le juge pénal et d’autres juges (doc 1).

B. Les problèmes posés par la conception française du principe

La conception restrictive de la matière pénale en droit français (doc 11) entraîne la possibilité de cumuler les poursuites mais aussi de cumuler les sanctions comme l’illustre l’arrêt du Conseil d’Etat dans l’affaire Bonne-maison (30 décembre 2014) (doc 16). Cette affaire montre même qu’un médecin accusé d’euthanasie peut être acquitté par le juge pénal et sanctionné disciplinairement pour les mêmes faits (doc 1). Ce cumul des sanctions trouve sa limite dans la règle énoncée par le Conseil constitutionnel dans une QPC du 17 janvier 2° (doc 16) selon laquelle le montant total de la sanction ne doit pas excéder celui de la plus forte peine encourue (doc 2). Par ailleurs, la règle de la triple identité permet parfois de contourner l’application du « non bis in idem », comme le souligne le rapport Coulon (doc 2). Ainsi, c’est au niveau de l’identité des parties que l’on peut jouer sur les différents rôles supportés par une même personne (doc 2) ou bien c’est au niveau de l’identité des faits que l’on peut qualifier juridiquement de différentes façon (doc 4).
Le droit français retient donc une application restrictivede l’application du principe non bis in idem et son régime conduit parfois à l’écarter lorsqu’il avait dû s’appliquer. On observe cependant une récente évolution dûe à l’influence de la CJUE et surtout de la CEDH.

II. L’évolution récente du droit français à l’égard du principe « non bis in idem »

Cette évoltion, dûe à l’influence de la CJUE et de la CEDH (A), a permis d’opérer une véritable modification vis-à-vis de la prise en compte du principe (B).

A. L’influence de CJUE, de la CEDH et du droit européen

Dès le 10 février 2009, la CEDH a condamné la Russie qui, comme la France (doc 4), considérait que des faits identiques, s’ils étaient qualifiés différemment, pouvaient faire l’objet de deux actions devant le juge pénal (doc 17). La Cour retenait donc l’identité des faits matériels. Par ailleurs, la CEDH a toujours insisté sur l’autonomie de la définition de l’infraction selon la Convention (doc 19). Pour la CEDH, le champ pénal de l’infraction comprend aussi la matière pénale ou fiscale (doc 11). Une réserve sur l'article 4 du Protocole 7 (doc 21) qui restreindrait la notion d’infraction serait censurée par la Cour (doc 18) comme se fut le cas de l’Italie en 2014 dans l’affaire Grande Stevens. La CEDH a ainsi sanctionné le cumul possible en droit italien entre une sanction pénale et une sanction découlant d’une autorité indépendante (doc 1). La CJUE a une position plus réservée sur le sujet : ainsi, elle considère qu’un tel cumul est contraire à l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux mais elle laisse le juge national appliquer les critères de la CEDH. Enfin, le droit de l’Union s’est aussi mêlé du sujet dans une directive de 2014 sur les abus de marché en soulignant le fait que les Etats devaient faire attention à ne pas violer le principe de « non bis in idem » (doc 7).

B. La modification consécutive de la place du droit français

C’est dans le domaine des abus de marché que le droit français est revenu sur sa position (doc 14). Ainsi dans une QPC du 18 mars 2015 (doc 13), le Conseil constitutionnel a repris la notion de l’identité des faits matériels en soutenant que le manquement d’initié passible d’une sanction par l’autorité des marchés financiers (doc 8) selon la procédure du Code monétaire et financier (doc 9) répond aux mêmes faits que le délit d’initié du Code pénal.
S’il ne remet pas en cause le principe de la possibilité de cumuler les sanctions le Conseil précise qu’il y a quatre conditions cumulatives pour appliquer le principe non bis in idem et écarter la possibilité de cumul des poursuites et des sanctions (doc 16). Les faits ne doivent pas être qualifiés de manière identique, ils ne doivent pas protéger les mêmes intérêts sociaux, ils doivent avoir une sévérité différente et dépendre d’un ordre juridique différent (doc 16). Les juges ont du mal à reprendre ces critères et dans deux affaires récentes, ils en ont renvoyé en QPC (doc 20). Un réforme législative se profile afin de rendre impossible le cumul des poursuites en matière d’abus de marchés (doc 10). Elle s’appuie sur une concertation entre le parquet et l’AMF (doc 12). Certains demandent à ce que les cas les plus graves soient réservés au juge pénal (doc 10) et que l’AMF intervienne via la procédure de l’échevinage et le rôle d’amicus curia (doc 14).

Sources
CEDH 4 mars 2014, GRANDE Stevens
CEDH 27 août 2002
Conseil constitutionnel, 18 mars 2015
« France, les compétences criminelles concurrentes nationales et internationales et le principe ne bis in idem »
Criminelle 23 octobre 2013
Décision de la CEDH, 6 juin 2019
QPC du conseil constituionnel, 18 mars 2015
Le principe de droit « Non bis in idem » Cour de cassation 17 mars 1999

 

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