Propos introductifs
C’est à l’occasion d’une interview accordée à la chaîne BFMTV, le 2 juin dernier, que Laurent Nuñez, l’actuel Préfet de police de Paris, a considéré que le droit pénal français et partant, le code pénal national, ne dispose pas de textes suffisamment forts afin de réprimer les comportements observés suite à la victoire du PSG, le week-end précédent. Ainsi, ce dernier a pu déclarer lors de cet entretien que le droit pénal national a besoin de « textes qui permettent d’être répressifs ». Par cette déclaration, le Préfet de police de Paris insinue que le droit pénal français n’est pas suffisamment fort (vraisemblablement laxiste) pour répondre aux faits de violence observés notamment sur les Champs Élysées, à Paris. Ceci étant, il est nécessaire de souligner ici le fait que le droit pénal ne reste pas muet, incapable de répondre à ces faits. Notre développement constitue par ailleurs l’occasion de revenir sur ce que dit le droit, et il permet également, s’il fallait le rappeler, que nombre de principes doivent être respectés, dans le cadre de l’Etat de droit, à l’instar du respect de la procédure bien sûr, mais aussi de la nécessaire individualisation des peines prononcées.
Le droit pénal français est-il réellement laxiste ?
À l’occasion de cette entrevue télévisée, nul doute que le Préfet de police de Paris s’est interrogé sur le caractère supposé du droit pénal français face aux faits de violence reprochés à nombre d’individus arrêtés en marge du rassemblement faisant suite à la victoire du PSG dans la capitale. Toutefois il nous faut rappeler ici que les textes existent et qu’ils sont en effet appliqués, qu’ils ne restent pas lettre morte. Il est sûrement utile également de retenir que pour condamner utilement et valablement un individu, il est nécessaire de rassembler l’ensemble des preuves au regard de l’infraction reprochée à ce dernier.
Pour reprocher ce qu’il considère comme l’absence de textes répressifs, Laurent Nuñez retient le pillage de magasin, notamment observé à la télévision. Il faut ici retenir que le code pénal, en son article 322-1, s’intéresse à ce cas particulier. Il prévoit ainsi que « la destruction, la dégradation ou la détérioration » est passible de deux années d’emprisonnement et de 30 000€ d’amende. De même, retenons que les dispositions de l’article 322-4 dudit code intéressent le vol et prévoient des peines de prison conséquentes lorsque celui-ci est commis avec deux voire trois circonstances aggravantes. Ceci est d’ailleurs le cas concernant les pillages de magasins.
Qu’en est-il des échauffourées avec les forces de l’ordre ?
Si des scènes de pillages ont bien été observées, il est aussi à noter que nombre d’affrontements ont eu lieu avec les forces de l’ordre. Il est primordial maintenant de souligner le fait qu’à nouveau le code pénal n’est en rien muet à cet égard. Ainsi il conviendra de relever les dispositions des articles 222-7 et suivants dudit code : des condamnations sont donc bel et bien prévues par ces dispositions légales. De surcroît il est sûrement utile de rappeler les dispositions de l’article 222-14-5 du code pénal qui intéressent plus spécifiquement les violences à l’encontre des forces de l’ordre.
L’on voit donc très clairement qu’il existe en effet des textes pénaux dans le but de punir de tels comportements et infractions. Il est par ailleurs utile de souligner le fait qu’arrêter un individu n’emporte pas nécessairement et automatiquement sa condamnation. La procédure qui doit obligatoirement suivre, de même que la démonstration de la commission de telle infraction doivent ensuite être remplies afin que l’individu puisse par la suite être condamné.
Cette question de la charge de la preuve, nécessaire dans tout État de droit, poserait toutefois des questionnements pour le Préfet de police quant à l’application effective de textes juridiques contenues au sein du code pénal. Ce dernier s’est en effet interrogé sur la question de savoir s’il faudra « justifier que la personne [poursuivie] a bien commis le vol ? »… Ce questionnement apparaît néanmoins interpelant dans la mesure où il n’est pas possible de contrecarrer le principe de présomption d’innocence sans l’apport de preuves effectives. N’oublions pas que ce principe est effectivement garanti en droit français et droit européen, par les dispositions de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme (DDHC) et du citoyen ainsi que par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Comment s’applique la loi pénale ?
Le rappel de cette question de l’application de la loi pénale est nécessaire en ce que sur les centaines d’individus en effet interpelés, nombre d’entre eux ont d’ores et déjà été jugés puis condamnés. Les peines qui furent prononcées à leur encontre ont été vivement critiquées par Gérald Darmanin, le ministre de la justice. Selon lui, les peines ne sont pas « à la hauteur de la violence » démontrée (pour rappel, les peines prononcées courent entre quelques mois d’emprisonnement avec sursis à un an d’emprisonnement avec une partie de la peine ferme.
Il est important de noter, lecture faite du communiqué de presse du parquet de Paris, que l’institution met tout en œuvre afin que soient ouvertes des audiences de comparution immédiate et ce, en garantissant le respect de la procédure.
À cela toutefois il nous faut bien garder en tête que le juge pénal ne doit pas décider de manière systématique de la peine encourue par les individus qui sont déférés devant son office, qu’il se doit d’examiner les faits qui lui sont présentés in concerto et qu’il doit respecter le code pénal et ses règles, selon le principe de l’individualisation des peines, conformément à l’article 8 DDHC…
Références
https://archive.ph/pas8p
https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/06/03/violences-en-marge-de-la-victoire-du-psg-trois-condamnations-a-paris-et-62-personnes-presentees-a-la-justice_6610343_3224.html
https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2005/2005520DC.htm#numero-considerant-3
https://www.linkedin.com/posts/parquet-de-paris_faits-violents-commis-lors-des-festivités-activity-7335930554954969088-rTY4?utm_source=share&utm_medium=member_desktop&rcm=ACoAABHqmpsBoVSNZBImZcMptyjOYPJXPW-DkW8