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L'empiètement en droit des biens

Quelle est la notion de l'empiétement en droit des biens ? Retenons notamment que le propriétaire victime d'un empiétement dispose d'un arsenal juridique pour se défendre.

Mémoire en droit des biens

Credit Photo : Unsplash Tierra Mallorca

Le cas des constructions empiétant sur le terrain d’autrui : le principe de la démolition

Dans une décision rendue par la Cour de cassation, le 23 novembre 2022, la Troisième chambre civile est venue rappeler que tout empiétement d’une construction, peu importe sa nature, sur le terrain d’une autre personne revêt la nature d’un trouble manifestement illicite de la propriété d’autrui et emporte la démolition de ladite construction (n° 22-19.200).

Revenons sur les faits de l’espèce. Ici, il s’agissait d’une construction qui nécessitait, compte tenu du terrain sur lequel elle repose, de procéder à l’implantation de tirants d’ancrage. Ce sont ces derniers qui empiétaient sur le terrain voisin, appartenant à une société civile immobilière. Les juges du premier degré donneront raison à la SCI et exigeront la démolition de la construction. Toutefois, les propriétaires de cette dernière interjetteront appel en arguant notamment d’un abus de droit de la part de la société (ils considèrent, relève la Cour de cassation, qu’« il serait disproportionné de les condamner à réaliser de tels travaux » afin qu’il soit mis un terme à l’empiétement, d’autant plus que la société ne retirerait pas d’intérêt concret de cette démolition). Les juges du second degré condamneront également les propriétaires de la construction, argumentant leur décision par la nature même du droit de propriété qui est à la fois absolu et perpétuel.

Mécontent, le couple se pourvoit en cassation mais la Troisième chambre civile vient confirmer le jugement de la Cour d’appel. Les juges rappellent explicitement qu’un empiétement constitue un trouble manifestement illicite de la propriété d’autrui, peu importe son ampleur. Pour qu’il soit mis fin à ce trouble, il est nécessaire de procéder à la démolition de la construction. Pour ces derniers, il n’existe aucun caractère disproportionné relatif au coût de cette opération.
Ainsi, il faut comprendre de cette décision que peu importe la nature de l’empiétement, qu’il soit minime ou majeur, celui-ci doit cesser et cela implique in fine la démolition de la construction en cause.

Le cas des arbres : que peut faire un propriétaire victime d’un tel empiétement ?

Il se peut qu’un propriétaire soit ennuyé par les branches d’arbres plantés sur le terrain de son voisin. Le Code civil a expressément prévu cette possibilité en son article 673. Ainsi, si « les branches des arbres, arbustes et arbrisseaux » dépassent sur son terrain, il est en mesure de « contraindre [son voisin] à les couper. » Toutefois concernant les racines, les ronces ou encore les brindilles, le propriétaire ennuyé peut procéder directement à leur coupe dès lors qu’elles empiètent sur son terrain.
Les branches d’arbres doivent-elles résulter sur un préjudice pour le propriétaire du terrain sur lequel elles empiètent ? Pour le cas où les voisins ne s’exécutent pas, le propriétaire est en mesure de contraindre l’autre propriétaire à s’exécuter sans qu’il ne soit besoin pour lui de démontrer un quelconque dommage, un quelconque préjudice. Le propriétaire est victime d’un empiétement qui doit cesser, et il n’a aucunement besoin de démontrer qu’il s’agit d’un trouble anormal du voisinage. Attention, de ces règles il ne faut pas comprendre que le Code civil restreint un droit de propriété (celui des propriétaires des arbres en cause) au profit d’un autre droit de propriété (celui des autres propriétaires en droit de demander la coupe de certaines branches). Cette précision ressort d’un arrêt de la Troisième chambre civile de la Cour de cassation rendu le 3 mars 2015. Il s’agit purement et simplement d’ériger certaines règles en matière de bon voisinage. Par ailleurs, poursuivent les dispositions du Code civil, ce droit de demander la coupe des branches en cause est imprescriptible : alors, aucun délai de prescription ne saurait valablement être opposé au propriétaire qui en fait la demande. Finalement, ce droit de nature imprescriptible ne saurait être exercé qu’à l’égard des fonds (des terrains) contigus et donc qui se touchent l’un l’autre (cf. Cass. 3e civ, 20 juin 2019) ; si maintenant les arbres en question sont plantés sur la limite séparative entre les deux fonds, en pareille hypothèse chacun des propriétaires des fonds sont tenus de leur entretien et donc de leur coupe potentielle dans la mesure où les arbres sont considérés comme étant mitoyens (cf. dispositions de l’article 670 du Code civil).

Nous avons évoqué la contrainte par un propriétaire envers le propriétaire du fonds contigus de procéder à la coupe des branches qui dépassent sur son fonds. Toutefois se pose véritablement la question de savoir comment procéder utilement à cette contrainte ? Tout d’abord il convient de noter que le propriétaire qui en demande la coupe devra mettre en demeure l’autre propriétaire par un écrit, par une lettre recommandée avec accusé de réception. Cet écrit est d’une particulière importance puisqu’il servira de preuve dans le cadre d’une possible procédure judiciaire engagée en cas d’absence d’action de la part de l’autre propriétaire (il est bien évidemment également possible d’effectuer une telle mise en demeure avec l’aide d’un avocat). Si le propriétaire de l’autre fonds ne répond pas ou refuse de procéder à la coupe, ici, il conviendra de saisir le tribunal et de se faire assister par un avocat. Une nouvelle demande devra être effectuée mais cette demande sera effectuée sous astreinte ; en plus de cela il sera possible pour le propriétaire demandeur de demander le remboursement d’une part de l’ensemble des frais qui ont été exposés à l’occasion de la procédure judiciaire et des dommages et intérêts pourront éventuellement être demandés, sous couvert de démontrer que le propriétaire demandeur a subi un préjudice. C’est ainsi qu’avaient pu conclure les juges de la Cour d’appel de Lyon dans un arrêt rendu en date du 6 mars 2014 (cf. n° 12/06022).

Références

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046682841?dateDecision=23%2F11%2F2022+%3E+23%2F01%2F2023&page=1&pageSize=10&query=*empi%C3%A8tement&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typePagination=DEFAULT
https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/empietement.php
https://www.village-justice.com/articles/pas-petit-empietement,39562.html
https://aurelienbamde.com/2020/09/16/accession-immobiliere-et-empietement-sur-le-fonds-voisin/

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