Alors, à quoi renvoie cette notion de laïcité en droit français ? Décryptage.
La laïcité directement visée par le droit français
Puisque la laïcité renvoie au droit et qu’elle est directement visée par celui-ci, il convient pour toute étude menée à ce sujet de s’intéresser au texte mais aussi à la jurisprudence qui s’y rattache. La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État a permis la création de grands principes sur lesquels la laïcité telle qu’envisagée en droit français s’appuie, se base. Ce sont en vérité ces principes qui justifient la laïcité.
Pour preuve, il suffit de se reporter aux dispositions de son article premier qui dispose, entre autres, que « [la République] garantit le libre exercice des cultes » et ne le restreint en effet que lorsqu’il est porté atteinte à l’ordre public. C’est en fait, en d’autres termes, dans l’intérêt même de cet ordre public que des restrictions peuvent être apportées à ce libre exercice des cultes.
Le libre exercice des cultes : c’est quoi ?
Si la liberté de conscience est absolue, les choses se compliquent concernant ce libre exercice des cultes tel que visé par la loi. Pour comprendre ce qu’il en est, il faut se reporter aux considérations du rapporteur de cette loi, Aristide Briand. Celui-ci déclara que la République française « s’engage à garantir la pleine et entière liberté » des différentes « manifestations extérieures des croyances et des religions [et] qui constituent l’exercice des cultes. »
Plus encore, la notion d’exercice des cultes renvoie à l’ensemble des manifestations extérieures de la foi, non uniquement à un rassemblement de croyants. De fait, le port d’un signe extérieur et qui manifeste la foi d’un individu intéresse directement cet exercice d’un culte.
L’article 2 de cette même loi prévoit que l’Etat français « ne reconnait, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Cela signifiait et signifie que les collectivités n’intègrent plus et n’intègrent pas dans leurs budgets des dépenses intéressant l’exercice des cultes.
Ces dispositions entérine donc la neutralité de l’Etat au regard de l’ensemble des religions.
Une neutralité de l’Etat français
En vérité cette neutralité s’explique fort simplement pour Louis Méjan, l’un des rédacteurs principaux de la loi : si l’Etat protégeait ou salariait des cultes et pas d’autres, alors ces derniers seraient dans une situation d’inégalité par rapport à la loi. En ce qu’il est le « représentant de l’universalité des citoyens », s’il procédait ainsi il « [violerait] le droit des croyants. »
C’est en fait l’égalité des citoyens qui a poussé le législateur à reconnaitre cette neutralité de l’Etat.
Différentes règles applicables eu égard au lieu concerné
1/ Neutralité absolue pour les espaces de l’État et des autorités publiques. Aucun signe d’expression officielle d’une quelconque religion.
2/ La loi de chaque religion s’applique au sein des lieux qui sont affectés à l’exercice du culte.
3/ L’espace privé demeure privé, chacun est libre de suivre ou non les règles religieuses dans cet espace.
4/ Les règles dans l’espace public, de la société sont plus épineuses car il est somme toute peu régi. C’est dans ce dernier espace que les interprétations et la régulation qui s’y rattache y sont les plus problématiques.
La justification de certaines limitations à ce libre exercice des cultes
Il arrive que le législateur doive intervenir afin d’interdire certaines pratiques. Tel fut par exemple le cas lors du vote et de l’entrée en vigueur de la loi du 15 mars 2004 qui avait interdit les signes religieux extérieurs et donc ostensibles (dont il est impossible de cacher). Le législateur, ce faisant, avait dû faire attention à ne pas enfreindre les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme. Celle-ci prévoit, pour rappel, qu’il est possible de limiter l’expression de la foi religieuse notamment en cas de problèmes d’ordre public. Cependant, poursuit-elle dans son article 9, cette restriction doit être actée par une loi et elle doit être proportionnelle au but à atteindre en effet.
Cette loi de 2004 ne s’applique qu’au sein des écoles publiques de manière à ce que les jeunes femmes musulmanes, par exemple, puissent tout de même porter le voile mais au sein d’écoles privées, sous contrat avec l’Etat. En édictant une interdiction générale de la sorte pour les écoles publiques, l’Etat assure le respect de la liberté de conscience de chacun, permettant d’éviter toute pression de certains groupes ou individus à l’égard d’autres groupes ou individus.
Quid enfin de la liberté de conscience ?
La liberté de conscience est protégée par la loi de 1905 et plus précisément par son article 31. Cet article, très peu appliqué, méconnu, semblant être tombé en désuétude, protège les citoyens et leur liberté de conscience. Ils peuvent donc en toute liberté choisir de croire ou non en la religion. Si des pressions étaient effectuées sur ces personnes qui remettent en cause la religion, alors la loi avait prévu pour sanction une amende et une potentielle peine de prison pour tout auteur de telles pressions. Ces dispositions ne sont pas toutefois pas appliquées.
En bref, que retenir de cette notion de laïcité ?
La laïcité protège la liberté de conscience et ainsi la liberté de manifester ses croyances ou ses convictions à la condition que cette liberté exercée ne porte pas atteinte à l’ordre public. Cette notion de laïcité comprend la neutralité de l’Etat et détermine l’égal de tout le monde devant la loi sans procéder à une quelconque distinction de religion ou bien de conviction. La loi de 1905 demeure peut-être encore trop peu connue malgré les nombreuses pressions qui pèsent actuellement sur ce terme de laïcité et ce qu’il suscite au sein de la population.
Références
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000508749/
https://www.gouvernement.fr/qu-est-ce-que-la-laicite
https://www.dalloz-actualite.fr/node/laicite-c-est-quoi-en-droit#.YpiVP6BBzIU
https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-dynamiques-2012-1-page-17.htm