Cette douloureuse affaire, en servant de révélateur aux problèmes graves qui, ayant émaillé cette affaire, ont sûrement déjà eu lieu par le passé, pourra-t-elle devenir le déclencheur d'une réaction des différents acteurs de cette institution tant décriée pour ses lourdeurs, ses errements, ses contradictions, et, plus grave encore, pour ses erreurs manifestes, erreurs qui peuvent briser des vies ?
Nous allons, après avoir effectué un bref rappel de cette affaire, étudier quels ont été les principaux dysfonctionnements qu'elle a permis de mettre en lumière, au niveau de l'instruction, du traitement des accusés et de la conduite des médias.
Puis, dans un second temps, nous verrons quelle a été son influence sur ses acteurs principaux : sur les juges, et plus généralement sur les membres de l'institution judiciaire dont on ne peut qu'espérer qu'il tireront les conséquences de leur impéritie manifeste et en profiteront pour se réformer en profondeur afin d'éviter, à l'avenir, de sombrer à nouveau dans une débauche ridicule, consternante et tragique à la fois ; sur l'opinion, qui désormais peut tout à fait s'identifier aux accusés, et qui n'est plus protégée contre les accusations mensongères et les méthodes expéditives ; et sur les victimes elles-mêmes de l'affaire.
[...] Cette attitude, au-delà de son irrespect pour la déontologie que se doivent de respecter les journalistes, ne manque pas d'avoir des effets négatifs sur les prévenus, déjà privés de leur liberté, parfois de la garde de leurs enfants Les prises de position hâtives des médias renforcent dans l'opinion publique le caractère irrévocable et implacable de leur implication dans les faits qui leur sont reprochés, et enfonce un peu plus les individus inculpés dans leur culpabilité. Retranscription concrète de ces faits, les aveux de certains prévenus qui s'avèreront pourtant innocents. [...]
[...] Car être mis en prison ce n'est évidemment pas seulement être privé de sa liberté de mouvement. Les maisons d'arrêt françaises sont trop souvent vétustes, ce qui entraîne des conditions de vie difficiles. De plus, peu de prisons étant construite et la population carcérale augmentant structurellement, on assiste à une surpopulation inquiétante Face à cette situation, l'administration pénitentiaire est trop souvent atone. Devant cette passivité, on assiste à des scènes insoutenables : violence, viols, tortures, absence de soin, qui peuvent conduire à des tentatives de suicide. [...]
[...] Mais sa démonstration, loin d'être convaincante et ignorant bien souvent les révélations qui ont émaillé le procès, choque les accusés dont l'innocence a été implicitement prouvée au long des audiences. Tant et si bien que les avocats de la défense n'ont aucun mal à pointer les incohérences de M. Lesigne et à stigmatiser une justice de classe qui punit les faibles et acquitte les puissants. Finalement, le vendredi 2 juillet, à deux heures du matin, les jurés de la cour d'assises du Pas-de-Calais rendent un verdict conforme aux réquisitions du parquet : dix accusés sont condamnés, sept sont acquittés. [...]
[...] Daniel Legrand, dont on pense qu'il a joué un rôle de premier plan dans la mise en place de ce réseau, est présenté par ces amis ou collègues comme peureux soumis à l'autorité Or, le président du tribunal, plutôt que d'approfondir ces troublantes contradictions, préfère les passer sous silence Le premier coup de théâtre du procès intervient le 10 mai. Ce jour, M. Delay, après avoir nié son implication dans les faits qui lui sont reprochés pendant les trois années qu'a duré l'instruction, admet avoir violé à de nombreuses reprises ses enfants avec la complicité de son épouse. Mais surtout, il met hors de cause tous les autres accusés, même Aurélie Grenon et David Delplanque, qui étaient pourtant passés aux aveux lors de l'instruction. [...]
[...] Rappel des faits Le 4 mai 2004, s'ouvre à Douai le procès du réseau pédophile d'Outreau, petite ville de la banlieue boulonnaise. Dix-sept personnes sont soupçonnées de viols avec actes de torture et de barbarie de viols et agressions sexuelles aggravés et de corruption de mineurs et proxénétisme aggravé L'enquête a débuté en décembre 2000 : la direction de l'enfance et de la famille de Boulogne-sur-Mer, suspectant Thierry et Myriam Delay d'abus sexuels sur les personnes de leurs quatre enfants, informe le procureur de la République. [...]
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