Arrêt du 24 mars 1993, filiation paternelle, acte sous seing privé, pension alimentaire, enfant naturel, reconnaissance de paternité, acte authentique
Françoise, née en 1943 de Colette, assigne en justice la veuve de celui qu'elle prétend être son père. Déboutée par les juges du fond, elle s'est pourvue en cassation. Pour rejeter l'action en recherche de paternité, la cour d'appel a écarté l'argument tiré d'une reconnaissance effectuée par le prétendu père par acte sous seing privé, reconnaissance ayant néanmoins justifié sa condamnation par le tribunal d'Épinal le 17 mai 1945 à payer à la mère de Françoise une pension alimentaire pour l'entretien et l'éducation de celle-ci.
[...] Ce faisant, la Cour de cassation, se trouvait saisie de deux questions : Premièrement, est-ce qu'une reconnaissance établie par acte sous seing privé ayant servi de fondement à une décision de justice peut être retenue comme suffisante pour y établir la paternité de son auteur ? Deuxièmement, est-ce que les correspondances, échangées entre celui-ci et la mère de l'enfant ainsi que la connaissance par les proches de la mère de la situation de l'enfant suffisent à établir la possession d'état d'enfant naturel ? À ces deux questions, la Cour de cassation a répondu par la négative. Il convient alors de s'interroger sur les conditions de validité d'une reconnaissance avant d'examiner les éléments constitutifs de la possession d'état. I. [...]
[...] Les conditions d'existence : la possession d'état Les critères d'existence de la possession d'état sont en partie définis par le code Civil. Il s'agit cependant d'une notion de fait laissée à l'appréciation subjective des juges du fond, laquelle n'est pas toujours sans encourir la critique. A - Les critères légaux de la possession d'état La possession d'état suppose traditionnellement le nom, le traitement, la réputation?. Pour autant ces éléments ne sont pas toujours exigés cumulativement. En l'espèce, le nom faisait défaut. [...]
[...] La Cour de cassation a considéré qu'il n'en allait pas ainsi du jugement se fondant sur une reconnaissance par acte sous seing privé. A - La nécessité d'un acte authentique L'acte authentique visé par l'article 335 du code Civil ne peut être qu'un acte reçu par notaire ou par un officier d'état civil constatant la reconnaissance du père. Il peut cependant aussi s'agir d'un jugement prenant acte d'une reconnaissance. Or, en l'espèce il n'y avait pas eu de reconnaissance par devant notaire ou par devant un officier d'état civil. [...]
[...] Or, la Cour de cassation a cru devoir approuver les juges du fond qui ont considéré que les relations entre la mère et le prétendu père n'étant qu'épisodiques il n'y avait pas continuité de la possession d'état et que celle-ci ne pouvait être retenue. Il est vrai que les juges se montrent vigilant quant à l'existence de la possession d'état, afin de ne pas laisser l'établissement de la filiation d'un enfant aux aléas des comportements des adultes qui peuvent à leur gré faire ou défaire une possession d'état. [...]
[...] De ce fait, il ne pouvait avoir réitéré sa reconnaissance directement devant le juge. Aussi choquant que cela puisse moralement paraître, la décision de la Cour de cassation est en droit à l'abri de toutes critiques. Il n'en reste pas moins que compte tenu de la date de naissance de l'enfant, cette décision peut sembler sévère puisqu'à l'époque sa filiation ne pouvait être établie. Cependant, la Cour de cassation aurait pu en l'espèce admettre l'établissement de la filiation par la possession d'état. [...]
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