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Motion de censure et cohabitation : que prévoit l'article 49 de la Constitution

À l'issue des élections législatives de 2022, LFI a émis le projet d'un dépôt de motion de censure si un votre de confiance n'était pas demandé. Quelles sont ces notions ?

Motion de censure et cohabitation

Credit Photo : L'article 49 de Constitution © IDE

Disposant d’une majorité relative, la Première ministre Elisabeth Borne est dans une situation complexe. Peu de temps après les résultats officiels des élections législatives, la France Insoumise a fait savoir qu’elle avait pour projet de déposer une motion de censure dès le 5 juillet prochain si la Première ministre ne demandait pas de vote de confiance à l’Assemblée nationale. A quoi renvoient ces notions de motion de censure ? de vote de confiance ? Pourra-t-il y avoir cohabitation ? Réponses.


Responsabilité gouvernementale : de quoi parle-t-on ?

L’article 20 de la Constitution dispose que le Gouvernement « est responsable devant le Parlement » avant de renvoyer aux dispositions des articles 49 et 50 du même texte ayant trait aux conditions et procédures à cet égard. Sa responsabilité peut être mise en cause, devant les députés, par trois moyens. D’abord par l’article 49, al. 1er, qui renvoie à la question de confiance ; puis par l’article 49, al. 2, qui renvoie au dépôt d’une motion de censure ; enfin, par l’article 49, al. 3, lorsque le Gouvernement décide d’engager sa responsabilité sur un texte. Enfin, l’article 50 prévoit que l’Assemblée nationale peut, par un vote, entrainer la démission du gouvernement.
Si jusqu’à maintenant l’usage de ces différentes conditions et procédures prévues par le texte constitutionnel fut considérablement conditionné par le fait majoritaire, résultant sur une approbation quasi systématique au profit de l’exécutif, la situation aujourd’hui n’est plus la même. La Première ministre est en effet fragilisée, et, le camp présidentiel ne dispose plus d’une majorité absolue mais seulement d’une majorité relative.


Article 49, al. 1er : l’engagement de la responsabilité

Il revient à la Première ministre d’engager la responsabilité du gouvernement, « après délibération du Conseil des ministres ». Cette collégialité de la décision constitue une caractéristique du parlementarisme rationnalisé. Celle-ci fut mise en place pour éviter qu’un seul ministre puisse de manière spontanée engager la responsabilité ministérielle et gouvernementale, ce qui pourrait résulter, comme sous les IIIe et IVe Républiques, sur une instabilité gouvernementale chronique.
D’après ces dispositions, la Première ministre peut donc engager la responsabilité du gouvernement « sur son programme ou éventuellement sur une déclaration de politique générale ». Toutefois cet engagement de la responsabilité n’a rien d’obligatoire, s’agissant en effet d’une formalité purement facultative. Or un vote négatif entrainerait nécessairement la démission du gouvernement conformément aux dispositions de l’article 50 du texte constitutionnel suprême.
Le fait que certains gouvernements y ont eu recours et d’autres non a empêché l’instauration d’un réel usage en la matière. En vérité, certains ont pensé qu’ils détenaient leur légitimité directement du fait de la nomination du Chef de l’Etat, soulignant ainsi l’inexistence de la procédure d’investiture du Gouvernement par les députés, sous la Ve République. Certains ne l’ont pas fait car ils ne détenaient pas de majorité absolue à l’Assemblée nationale, à l’image de la Première ministre actuelle. En vérité le Gouvernement entre en fonction dès lors qu’il est nommé sans qu’un vote de confiance préalable de l’Assemblée nationale ne soit organisé et nécessaire. En effet, la confiance parlementaire est dite présumée. Néanmoins les députés peuvent renverser cette présomption en adoptant une motion de censure.

Article 49, al. 2 : la motion de censure

La motion de censure constitue une technique parlementaire qui permet à un groupe de députés de mettre en cause la responsabilité du gouvernement, de le censurer et finalement de le contraindre à la démission. Cet alinéa second de l’article 49 renvoie à la notion de motion de censure dite spontanée. La France Insoumise a déclaré sa volonté de recourir à cette technique si Elisabeth Borne décidait de ne pas prononcer, devant l’Assemblée nationale, une déclaration de politique générale.
D’un point de vue procédural il est nécessaire qu’au moins 58 députés, et donc un dixième des députés, déposent cette motion. Pour qu’elle soit adoptée et que le gouvernement soit amené à démissionner, cette motion doit être votée à la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale, et donc par un minimum de 289 députés.
Néanmoins les opposants politiques à la France Insoumise se montrent très critiques à l’égard de ce projet de dépôt d’une motion de censure. Même si les autres partis présents à l’Assemblée nationale se déclarent ouvertement opposés à la politique souhaitée par la majorité présidentielle pour le quinquennat qui vient de s’ouvrir, il n’en reste pas moins que beaucoup se montrent également réfractaires à faire alliance, de quelque manière que ce soit, avec cette proposition des Insoumis.
Si ce mécanisme de la motion de censure a semblé être dépourvu de toute utilité par le fait majoritaire, lorsque les majorités présidentielle et parlementaire concordaient, la situation actuelle détonne par son caractère somme toute inédit. De plus, le dépôt mais surtout l’adoption d’une motion de censure par les députés crée un conflit politique qui peut résulter sur la dissolution de l’Assemblée nationale. S’ils adoptent cette motion, les députés courent le risque d’être contraints de se présenter devant les électeurs français de manière prématurée et anticipée. Or les résultats de telles élections anticipées peuvent découler soit sur un renforcement surprise du camp présidentiel, ou bien à une cohabitation.
Il revient aux dispositions de l’article 12 de la Constitution de prévoir que la dissolution ne peut être actionnée que par le Chef de l’Etat qui ce faisant, convoque les électeurs pour élire de nouveaux députés. Il s’agit d’un pari risqué pour celui-ci puisque les résultats de ces élections peuvent aboutir à une cohabitation avec un Premier ministre issu d’un autre parti politique (comme celle entre Jacques Chirac et Lionel Jospin, entre 1997 et 2002), les deux têtes de l’exécutif étant contraints de coexister. Le Président de la République se trouve alors en quelque sorte relégué au second plan même s’il conserve des domaines particuliers comme la défense ou les affaires étrangères.
Emmanuel Macron et Elisabeth Borne ont toutefois déclaré que l’exécutif respectera le choix électoral des français. Cependant rien n’indique que la situation ne puisse valablement perdurer si aucun accord ne parvient à être trouvé entre l’exécutif et l’Assemblée nationale.
Pour clore, on comprend que la situation, déjà suffisamment compliquée depuis la semi-défaite du camp présidentiel à l’Assemblée nationale et qui ne dispose plus aujourd’hui que d’une majorité simple, est de nouveau complexifiée par les disparités entre les partis présents dans l’hémicycle. Reste à observer ce qui se déroulera finalement le 5 juillet prochain...


Références
Pauline Türk, Les Institutions de la Ve République, éd. Gualino, Paris, 2013
https://www.lejdd.fr/Politique/pourquoi-la-motion-de-censure-contre-borne-annoncee-par-la-france-insoumise-a-peu-de-chance-detre-vote-4118924
https://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/role-et-pouvoirs-de-l-assemblee-nationale/les-fonctions-de-l-assemblee-nationale/les-fonctions-de-controle-et-l-information-des-deputes/la-mise-en-cause-de-la-responsabilite-du-gouvernement
https://actu.dalloz-etudiant.fr/a-la-une/article/49-3-et-motion-de-censure/h/bd3190627a2fdce3b2e50785a51d6e6f.html

 

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