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Conformité partielle à la Constitution de la loi Jeux Olympiques 2024 (décision du Conseil constitutionnel)

Dans sa décision rendue le 17 mai 2023, le Conseil constitutionnel a décidé de déclarer la loi n° 2023-380 du 19 mai 2023, relative aux Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions, partiellement conforme au texte constitutionnel suprême (cf. décision n° 2023-850 QPC). Cette décision comprend notamment deux réserves d'interprétation spécifiques, à l'égard tout d'abord des analyses génétiques réalisées à l'occasion des contrôles antidopage, puis du traitement algorithmique des images qui seront collectées grâce à la vidéoprotection ou à l'utilisation de drones. Pourquoi le Conseil constitutionnel en a-t-il décidé ainsi ? Décryptage.

Inquiétudes autour des droits de l'homme - Projet de loi relatif aux Jeux Olympiques

Credit Photo : Caméras augmentées pour la surveillance des JO - europe1.fr/sport

Première réserve d’interprétation : la balance entre la lutte contre le dopage et le droit au respect de la vie privée

Insérée dans les dispositions de son article 5, la loi en cause ici intervient à l’effet d’affermir la lutte contre le dopage. Il est ainsi prévu dans les nouvelles dispositions de l’article L. 232-12-1 du Code du sport que le laboratoire antidopage français est en mesure de procéder à la comparaison d’empreintes génétiques et à examiner et analyser des caractéristiques génétiques des individus participant ou se préparant à participer à une manifestation sportive ; ce laboratoire est par ailleurs accrédité par l’Agence mondiale antidopage, et effectue de telles opérations dans des cas déterminés.
Dans le cadre de l’adoption de cette mesure, les parlementaires français ont recherché à poursuivre deux objectifs de valeur constitutionnelle, à savoir : la protection de la santé d’une part, la sauvegarde de l’ordre public d’autre part. En effet, ces derniers ont cherché à anticiper de possibles transgressions aux règles inhérentes à la lutte contre le dopage et à les rechercher. Cela permet in fine de garantir la protection de la santé des participants aux jeux, mais aussi à assurer la loyauté des épreuves qui auront lieu. Ces deux objectifs de valeur constitutionnelle poursuivis par les parlementaires sont en vérité pesé par rapport au droit au respect de la vie privée.
Les Sages du Conseil constitutionnel soulignent le fait que ce droit au respect de la vie privée implique nécessairement que l’examen et le traitement des données effectivement recueillies soient tous deux réalisés avec la plus grande vigilance. Pour ces derniers, il est nécessaire que tout individu effectivement contrôlé soit préalablement informé, avant que ce prélèvement ait lieu, et notamment lors de son inscription à une épreuve sportive à laquelle il compte participer, par rapport au fait que les échantillons qui seront prélevés peuvent faire l’objet d’une analyse génétique (ici, la nature de cette analyse et l’objectif de celle-ci doivent lui être présentés, expliqués).
C’est sous ce rapport que le Conseil constitutionnel décide de prononcer une réserve d’interprétation. Pour lui, il faudra que « les autorités administratives compétentes », et ce « sous le contrôle du juge », s’assurent que « les conditions dans lesquelles cette information est délivrée » au participant à l’épreuve sportive sont de nature à garantir que ce dernier consent par la même occasion que « [ces] échantillons [peuvent] faire l’objet d’analyses génétiques » (cf. §14 de la décision).

Seconde réserve d’interprétation : Algorithmes, sécurité et vidéoprotection face au droit au respect de la vie privée

Comme nous l’avions déjà évoqué dans un précédent article, l’article 10 de la loi relative aux Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 prévoit une expérimentation jusqu’au printemps 2025. Celle-ci s’inscrit dans un objectif déterminé qui est de garantir la sécurité de manifestations et qui, par leur nature même, sont exposées à des risques importants et déterminés. Cette mesure insérée dans cet article 10 prévoit que les images, qui seront recueillies par l’utilisation de la vidéoprotection ou par des drones, pourront faire l’objet de traitements algorithmiques (et donc un examen systématique et automatisé des images recueillies) et ce, dans le but de repérer et finalement révéler des évènements particuliers en temps réel (à l’image d’une attaque terroriste). Il s’agira, autrement dit, d’utiliser des logiciels de traitements automatisés ; les caméras qui seront utilisées à cet effet seront installées dans tous les lieux qui accueillent de telles manifestations, aux alentours de ces lieux, dans les transports publics qui les desservent ainsi que sur les voies qui y mènent.
L’utilisation de ces différents moyens d’ordres technique et technologique permet in fine d’accroitre le nombre d’informations effectivement collectées. Cette utilisation se doit néanmoins d’être accompagnée de garanties qui visent à sauvegarder le droit au respect de la vie privée des individus. Pour ce faire, les parlementaires français se sont assurés que la mise en place des traitements de ces images collectées mais aussi les possibles évolutions des traitements qui en seront faits soient placés sous le contrôle d’individus humains et ce, de manière permanente. Le second objectif de valeur constitutionnelle qui réside dans la sauvegarde de l’ordre public est balancé avec le droit au respect de la vie privée, lui-même protégé par les dispositions de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Dans cette décision QPC, le Conseil constitutionnel déclare que les dispositions de cet article 10 sont bien conformes au texte constitutionnel suprême mais considère que celles-ci doivent faire l’objet d’une réserve d’interprétation. Pourquoi donc ?

Le Conseil constitutionnel en a décidé ainsi car la durée totale de l’autorisation qui émane de l’autorité du préfet, pour un tel traitement des images recueillis par un algorithme, doit nécessairement être proportionnée à la durée de la manifestation, ledit traitement devant en garantir la sécurité. La loi prévoit que le préfet peut en vérité être en mesure de la suspendre, voire d’y mettre un terme, et ce, à tout moment pour le cas où il apparaitrait que les conditions qui ont permis de prendre cette décision ne sont plus rassemblées. Pour les Sages, si ces conditions ne sont plus rencontrées, alors le préfet est contraint de mettre un terme à l’autorisation préalablement édictée, la justification de celle-ci n’étant plus opérante en pareille hypothèse. Ils déclarent que le verbe « pouvoir », utilisé dans le texte de la loi, ne doit pas être interprété autrement qu’en tant que devoir. Si une telle hypothèse vient à se produire, alors le préfet devra nécessairement suspendre ou mettre fin à l’autorisation.

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