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L'article 73 du Code de procédure pénale invoqué par Alexandre Benalla et Vincent Crase

C'est à l'occasion de la deuxième semaine de leur procès qu'Alexandre Benalla et Vincent Crase ont, devant le Tribunal correctionnel de Paris, invoqué l'article 73 du Code de procédure pénale afin de s'exonérer des faits de violence qui leur sont reprochés. Il est notamment reproché à ces derniers des faits de violence ainsi que des faits d'immixtion dans la fonction de policiers à l'occasion de la manifestation du 1er mai 2018. Qu'en est-il réellement ?

L'article 73 du Code de procédure pénale invoqué par Alexandre Benalla et Vincent Crase

Credit Photo : Flickr Gongashan

 

Les faits de l’espèce en quelques mots

Une manifestation a lieu le 1er mai 2018 à Paris. Alexandre Benalla et Vincent Crase arrivent à la préfecture de police en début d’après-midi et ces derniers vont assister à la manifestation en qualité d’observateurs derrière un cordon de policiers. Toutefois, le premier porte un brassard de police et le second est armé. Quelques heures plus tard, de nombreux heurts commencent ; les deux observateurs vont pénétrer au sein du Jardin des Plantes et vont certainement outrepasser leur simple rôle d’observateur.

En effet, les deux hommes vont encercler Khalifa M. et l’interpeller puisque Alexandre Benalla dira, devant le Tribunal correctionnel, avoir vu ce dernier lancer une pierre en direction des CRS. Cette interpellation est pour lui « un réflexe citoyen », et, les deux hommes d’invoquer les dispositions de l’article 73 du Code de procédure pénale. Lors de cette interpellation, les deux hommes n’ont pas signalé aux CRS leur qualité d’observateur et ces derniers ont cru avoir affaire à des policiers en civil.

Khalifa M. sera finalement condamné la même année à six mois d’emprisonnement avec sursis pour violence sur les forces de l’ordre. À ce sujet, Alexandre Benalla n’éprouve aucun regret, considérant qu' « un agresseur de policier n’aurait pas été interpelé et condamné » s’il n’était pas intervenu, en application des dispositions de l’article 73 précité, en appréhendant en sa qualité de citoyen français « l’auteur d’un crime ou d’un délit ».

Que prévoient les dispositions de l’article 73 du Code de procédure pénale ?

Alexandre Benalla et Vincent Crase ont invoqué les dispositions de l’article 73 du Code de procédure pénale pour expliquer leur intervention lors de la manifestation du 1er mai 2018, plus exactement les dispositions de son alinéa premier. De quoi dispose cet alinéa ?

L’article 73 du Code de procédure pénale, alinéa premier, dispose que « dans les cas de crime ou de délit flagrant, toute personne a qualité pour appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche ».

Cette affaire est l’occasion pour nous de nous pencher sur ces dispositions, sur leur mise en oeuvre. En effet, une question se pose : comment appliquer valablement ce premier alinéa de l’article 73 ?

Tout d’abord, dans une interview sur LCI, l’ancien avocat d’Alexandre Benalla, maître Laurent-Franck Lienard, avait déclaré que « tous les citoyens ont le mandat [pour interpeller des délinquants], parce que l’article 73 du Code de procédure pénale nous accorde à tous [les citoyens] la possibilité d’interpeller des auteurs d’infractions flagrantes, à tous ».

La défense des deux hommes semble toutefois ne pas convaincre le Tribunal correctionnel de Paris dans la mesure où Alexandre Benalla portait un brassard policier et Vincent Crase portait une arme. Il semblerait que ces derniers souhaitaient agir en lieu et place de la police, plus que d’agir dans le cadre du devoir citoyen.

Ce premier alinéa vise « les cas de crime ou de délit flagrant », c’est-à-dire une situation dans laquelle une personne est prise sur le fait alors qu’elle commet un crime ou un délit, ou bien lorsque l’acte en cause est achevé, mais des indices probants témoignent de la culpabilité de l’auteur de ces faits ; ainsi soit l’infraction est actuellement en train de se commettre, soit elle vient de s’achever. Dans les deux cas, les citoyens peuvent agir pour arrêter l’auteur des faits.

À ce sujet, l’article 73 du Code de procédure pénale reconnaît effectivement un droit d’interpellation à destination de tous les citoyens qui seraient témoins de tels actes. Or ici, la lecture de cet article qui apparaît pourtant très simple doit être expliquée. En effet, l’interpellation du délinquant doit tout d’abord être nécessairement proportionnée et surtout l’individu arrêté doit être conduit auprès des forces de l’ordre, auprès d’un officier de police judiciaire dans un bref délai. Ceci ne semble pas avoir été le cas dans cette affaire puisque les forces de l’ordre présentes ce jour-là ont considéré qu’Alexandre Benalla et Vincent Crase étaient des collègues en civil. 

Précision au sujet de cette procédure de flagrant délit : celle-ci ne trouve pas à s’appliquer dans diverses matières, notamment les délits de presse, ou encore concernant les infractions qui sont réprimées par une loi spéciale (entre autres).

Les deux hommes ont invoqué cet article pour s’exonérer des faits qui leur sont reprochés. Ils considèrent avoir agi comme l’aurait fait tout autre citoyen dans une telle situation pour arrêter des délinquants. Toujours est-il que Maxence Creusat, commissaire, a affirmé qu’en leur simple qualité d’observateurs, ces derniers n’auraient pas dû intervenir comme ils l’ont fait. Celui a ajouté que cette intervention malheureuse « rejaillit sur la confiance qu’a le citoyen dans la police » ; il avait de même déclaré que l’interpellation en cause était « un coup de canif dans le monopole de l’exercice de la violence légitime, dans le contrat social ».

 

Sources : Dalloz, Cabinet Aci, Légifrance

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