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Les couloirs humanitaires en droit international humanitaire

Il arrive fréquemment qu'à l'occasion d'un conflit l'on entende le terme de « couloirs humanitaires » ou « corridors humanitaires » mis en place afin de permettre aux populations civiles d'échapper à la zone ou aux zones sur lesquelles ont lieu des combats.

Les couloirs humanitaires

Credit Photo : Cartographie Le Monde Francesca Fattori et Victor Simonnet

La situation actuelle en Ukraine n’a pas échappé à cette réalité. Il fut en effet mis en place de manière conjointe des cessez-le-feu et des couloirs humanitaires un peu partout sur le territoire en proie aux combats entre les forces armées ukrainiennes et russes. Toutefois leur mise en œuvre et le respect des règles inhérentes à ces couloirs demeurent difficiles dans la pratique. Alors à quoi renvoie cette notion en droit international humanitaire ? Décryptage.


Couloirs humanitaires : une obligation du droit international humanitaire

Les couloirs humanitaires (ou corridors humanitaires, ces deux notions sont en vérité synonymes) revêtent la nature d’un ou de plusieurs espaces déterminés dans une zone elle aussi déterminée. Cette dernière peut être le lieu de combats armés, ou bien le lieu où s’est déroulée une catastrophe naturelle par exemple. On voit donc tout d’abord que cette notion peut être utilisée à l’égard d’évènements de natures somme toute différentes.
De manière plus spécifique maintenant, et dans le cadre du droit international humanitaire, les couloirs humanitaires constituent une obligation. Ces derniers doivent permettre la mise en œuvre de deux choses. En effet ils permettent tout d’abord aux populations civiles qui ne participent pas de manière directe aux combats d’échapper à la zone ou aux zones de conflits. Ensuite ces couloirs permettent l’arrivée de l’aide humanitaire dans cette ou ces mêmes zones.
Dans le cadre des conflits internationaux, les Conventions de Genève de 1949 prévoient par ailleurs différentes obligations sous ce rapport. A ce sujet, nous pouvons retenir les dispositions des deux premiers alinéas de l’article 23 de la IVe Convention de Genève, relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre. Ces dispositions sont importantes dans la mesure où elles prédéfinissent les règles devant être respectées, en théorie on le verra par la suite, dans le cadre d’un conflit armé par l’ensemble des Etats belligérants. Ces dispositions conventionnelles prévoient entre autres « le libre passage de tout envoi de médicaments et de matériel sanitaire » et de « vivres indispensables » au profit des populations civiles directement touchées par le conflit en cours mais qui n’y participent pas de manière directe et active.  
Attention cependant, comme le prévoit en effet cet article 23 précité, il est ici opportun de souligner le fait que bien qu’il s’agisse d’une obligation, toute mise en œuvre de convois humanitaires demeure « subordonnée » à une certitude, à savoir que ces convois ou corridors ne soient pas « détournés de leur destination », d’une quelconque manière que ce soit, par les forces militaires ennemies.
C’est en ce sens que Kiev avait refusé toute mise en place d’un convoi humanitaire sur son territoire au début du conflit qui l’oppose à la Russie, le gouvernement ukrainien craignant en effet que les forces armées russes ne profitent de ces convois pour déplacer les populations civiles ukrainiennes sur le territoire biélorusse, État acquis à la cause de Moscou.
Outre la consécration de l’idée de ces couloirs de manière conventionnelle, ce principe fut véritablement réaffirmé par l’Assemblée générale des Nations Unies, le 14 décembre 1990, par l’adoption de la résolution n°45/100. A cette occasion, l’Assemblée générale a mentionné le fait que l’aide acheminée au bénéfice des populations civiles est le plus souvent effectuée par des organisations intergouvernementales ou des organisations non gouvernementales. Par cette résolution, elle invite de plus les parties belligérantes « à faciliter » l’instauration de cette assistance humanitaire par ces différentes organisations (§4 de la résolution).
Finalement l’ensemble des acteurs d’un conflit doivent permettre le respect de l’accès à une aide humanitaire pour les populations civiles.
On le comprend donc clairement, les couloirs humanitaires consistent en un grand principe issu du droit international humanitaire, et plus précisément des Conventions de Genève eu égard à la protection des populations civiles ne prenant pas part aux combats. Néanmoins leur instauration d’une part, leur strict respect d’autre part, par l’ensemble des parties belligérantes sont relativement peu aisés dans la pratique… Pourquoi un tel constat ?


Une difficile mise en œuvre pratique des couloirs humanitaires

Les règles en la matière sont absolument louables sur le fond. En effet il est plus que nécessaire, primordial même, d’aider et d’évacuer les populations civiles qui ne prennent pas part au conflit. Néanmoins au vu des considérations ci-dessus développées on s’aperçoit très rapidement que les règles conventionnelles en la matière sont obscures aussi bien dans la façon même d’instaurer ces couloirs que de les faire respecter effectivement.
A ce difficile constat s’ajoute aussi le fait que la mise en œuvre de ces couloirs ou corridors humanitaires dans des régions le plus souvent ruinées, voire parfois difficiles d’accès, nécessite une logistique conséquente. La bonne organisation et le respect de ces couloirs sont par ailleurs laissés aux mains des parties en conflit. Cela signifie, en d’autres termes, que la mise en place des couloirs humanitaires implique dans la pratique, sur le terrain, non seulement le strict respect du droit international humanitaire, mais aussi et surtout le strict respect des engagements pris par les belligérants pour laisser les organisations intergouvernementales ou non gouvernementales agir en effet au profit des populations civiles, victimes du conflit.  De même, à cela s’ajoute la nécessité de respecter l’acheminement efficient de l’aide humanitaire et des biens au profit de ces mêmes populations.
Or force est de constater que toute l’efficacité inhérente à tout corridor humanitaire dépend de conditions qui s’avèrent difficilement envisageables et conciliables dans les zones en conflit. Pour preuve jusqu’à présent et dans l’immense majorité des cas pour lesquels de telles mesures furent envisagées, très peu, trop peu d’entre elles furent réellement instaurées et surtout respectées.
Pour clore, selon le porte-parole du Comité international de la Croix Rouge, Frédéric Joli, ces couloirs humanitaires demeurent aujourd’hui trop souvent une simple idée lancée et éventuellement discutée à l’occasion de pourparlers organisés entre les parties au conflit mais jamais réellement mis en place…


Références
https://www.publicsenat.fr/article/politique/ukraine-qu-est-ce-qu-un-couloir-humanitaire-197279
https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/geneva-convention-relative-protection-civilian-persons-time-war
https://www.icrc.org/fr/comment-les-couloirs-humanitaires-fonctionnent
https://www.memoireonline.com/06/17/9969/m_La-communaute-internationale-face--la-crise-libyenne-quel-equilibre-entre-le-droit-dingerence11.html

 

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