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Droit à l'IVG dans la Constitution : vote favorable du Parlement, comparaison avec nos voisins européens

Les députés et les sénateurs ont voté favorablement le 4 mars 2024 pour le projet de loi constitutionnelle relatif à l'interruption volontaire de grossesse (ci-après IVG) et qui avait été présenté lors du Conseil des ministres en date du 12 décembre 2023. Revenons sur l'inscription de cette liberté au sein de la norme suprême française. Décryptage.

La constitutionnalisation de l'IVG

Credit Photo : Senat

Une demande d’inscription dans la Constitution initiée dès 2022

Souvenez-vous, cette volonté d’inscrire la liberté de recourir à l’IVG dans la Constitution remonte à 2022 lorsque, de l’autre côté de l’Atlantique, la Cour suprême des Etats-Unis avait décidé de procéder à un revirement de jurisprudence en renversant l’arrêt Roe vs. Wade qui datait de 1973 et qui déterminait le cadre légal américain de l’avortement. Pour appuyer cette nécessité de modifier la Constitution en y inscrivant cette nouvelle disposition, il était question pour les députés de La France Insoumise de contrecarrer la potentialité d’un danger face à ce qu’ils considèrent comme « des velléités de revenir sur ce droit fondamental » comme tel était et continue d’être le cas chez certains de nos voisins européens. Les sénateurs, pour leur part, ne considéraient pas que ce droit était remis en cause en France.

La volonté gouvernementale de trouver un nécessaire équilibre entre les positions des deux chambres du Parlement

A la lecture de l’exposé des motifs, il est précisé par le Gouvernement que ce texte, comportant un unique article, et ayant été validé en première lecture par 493 voix pour, 30 contre, doit permettre la consécration de ce recours à l’IVG dans la Constitution, et donc au sommet de la hiérarchie des normes, « prémunissant ainsi [la France] contre toute remise en cause. » Le Ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, a d’ailleurs considéré sur X que « l’Assemblée nationale est au RDV de l’Histoire des femmes. »

La rédaction de ce texte comprend en outre une réelle volonté du Gouvernement de trouver un nécessaire équilibre entre des positions bien différentes entre les deux chambres du Parlement. Il s’agit de la consécration d’une liberté qui se comprend et se justifie à l’aune des dispositions mais aussi de l’esprit de la loi Veil du 17 janvier 1975. Bien que l’IVG soit amenée à être constitutionnalisée, il n’en demeure pas moins que le rôle propre du Parlement continuera d’être plein et entier en ce qu’il lui revient d’établir « [les] conditions dans lesquelles s’exerce cette liberté ». Ce qui change réside dans le fait que cette liberté est garantie, fondée par le texte constitutionnel suprême. La liberté de recourir à l’IVG sera par voie de conséquence protégée de manière juridique par le Conseil constitutionnel s’il est saisi, aussi bien dans le cadre d’un contrôle a priori (lorsqu’une loi vient d’être votée) ou a posteriori (et donc par la voie de la question prioritaire de constitutionnalité).


Des menaces bien réelles contre la possibilité de recourir à une IVG ?

L’existence de telles menaces possiblement apportées à l’encontre de l’IVG a été le cœur de nombreux débats. Cette existence ne fait absolument pas consensus parmi les membres du Parlement.

Par exemple la députée RN du Gard, Pascale Bordes, a déclaré lors de la séance du 30 janvier qu’« aucun parti politique représenté au Parlement » ne souhaite plus remettre en cause ce droit, celle-ci n’ayant pas participé au vote à l’Assemblée nationale. Elle poursuit en précisant que cette « liberté de la femme d’avorter est pleinement protégée par la loi défendue par Simone Veil » il y a de cela presque cinquante ans.


Ces déclarations peuvent cependant prêter le flan à la critique, et, c’est bien en ce sens que la Sarah Tanzilli, députée Renaissance du Rhône, a précisé qu’« une simple loi ordinaire » serait purement et simplement en mesure de mettre un terme à cet édifice juridique « qu’une succession de lois a créé en un demi-siècle. »
Par voie de conséquence, il est nécessaire de comprendre que l’arrivée au pouvoir d’un parti réactionnaire ne peut pas être écartée de manière certaine en France : or ces partis réactionnaires lorsqu’ils accèdent au pouvoir font, le plus souvent, du droit à l’avortement une cible toute privilégiée. Elle prend par ailleurs les exemples de la Hongrie ou encore de l’Italie qui, bien qu’il s’agisse de démocraties, ont pu voir des politiques visant à mettre à mal ce droit à l’interruption volontaire de grossesse.

Se pose finalement la question de savoir quelle est la situation chez nos voisins européens ?

Qu’en est-il enfin de la situation chez nos voisins européens quant au délai légal ?

En mars 2022, le législateur français avait décidé de modifier les règles en matière de délai légal afin de pouvoir valablement recourir à une IGV. Ainsi, ce délai était passé de 12 à 14 semaines. Par cette décision, le législateur a positionné la France parmi les Etats européens qui proposent un délai légal relativement allongé comme en Espagne, la moyenne européenne (voire un peu plus de la moitié de ces Etats en réalité) étant fixée à 12 semaines (tel est le cas en Italie, en Roumanie ou encore en Allemagne).


Il est intéressant de noter que deux Etats, la Suède ainsi que les Pays-Bas, proposent des délais beaucoup plus conséquents, puisqu’ils proposent de manière respective un délai de 18 et de 24 semaines pour recourir à une telle interruption. Notons également que deux Etats membres refusent toujours à ce jour d’admettre la possibilité de recourir à une IVG, à l’exception de quelques cas bien particuliers, à savoir : en cas de viol ou d’inceste ou lorsque la mère est dans une situation de danger. Ces deux Etats sont Malte et la Pologne. Si le Parlement vient à adopter ce projet, alors la France deviendrait le tout premier Etat au monde à « cette liberté inaliénable [au sein de] sa Constitution » a précisé Eric Dupond-Moretti. Reste pour le moment à attendre le très incertain vote final des sénateurs attendus en février 2024…


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