Depuis 1865, la jurisprudence fait preuve d'une constance remarquable en matière de reconnaissance de l'égalité entre les associés, qu'ils soient apporteurs en capital ou apporteurs en industrie. Cependant, la formulation parfois confuse de certaines lois suffit à semer le trouble.
Dans cet arrêt de la 1ère chambre civile du 30 mars 2004, la Cour de cassation se veut de préciser l'application de l'article 1844-5 du Code civil dans le cas de la dissolution d'une société civile professionnelle d'huissiers.
En l'espèce, M. X…, huissier de justice à Paris, et Mme Y…, principale clerc, ont créé, le 5 décembre 1990, une société civile professionnelle titulaire d'un office d'huissiers de justice. M. X… a effectué un apport en capital à la société en apportant l'office d'huissier de justice dont il est titulaire. De son côté, Mme Y… procède à un apport en industrie. Le capital de la société, évalué à 5 600 000 francs, est attribué à M. X…. Les deux associés reçoivent chacun 50 parts en industrie. Il est également convenu le même jour entre M. X… et Mme Y… que cette dernière s'engageait à racheter à M. X…, dans le délai d'un an, un tiers de ses parts.
Mme Y… n'ayant pas respecté son engagement, M. X… décide, en 1999, de solliciter la dissolution de la société civile sur le fondement de l'article 1844-5 du Code civil qui donne à l'associé qui tient "toutes les parts sociales en une seule main" la possibilité de demander la dissolution de la société.
La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 6 juillet 2001, donne raison au requérant, notifiant que la qualité d'associée de Mme Y…, en tant qu'apporteuse en industrie, n'était pas établie, et qu'ainsi, M. X…, seul associé, pouvait solliciter la dissolution.
Mme Y… se pourvoit alors en cassation, en se fondant sur sa qualité d'associée ainsi que sur sa détention de parts en industrie, qu'elle souhaite voir reconnues en vertu de l'article 1844-5 du Code civil et de l'article 85 du décret du 31 décembre 1969. Mme Y…requiert également dans un second moyen, sa réintégration dans les comptes de la société. Cependant seul le premier moyen fera l'objet d'une analyse.
La Cour de cassation doit statuer sur la question de la possibilité qu'a l'associé d'une société détenant toutes les parts sociales, de la dissoudre, selon l'article 1844-5 du Code civil, alors qu'un second associé, cependant seulement apporteur en industrie, fait partie de la société et refuse la dissolution. La Cour de cassation casse et annule dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris.
De la décision de la Cour de cassation dépend le statut d'associé de l'apporteur en industrie. Cette qualité d'associé est souvent controversée, du fait de la rédaction de la loi, prêtant à confusion. La Cour de cassation se trouve donc confrontée au problème de compréhension engendré par la formulation de l'article 1844-5 "toutes les parts sociales en une seul main" (I.). Elle se propose de mettre fin à cette confusion, en adoptant une interprétation en faveur de l'apporteur en industrie (II.)
[...] Commentaire de l'arrêt de la Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile mars 2004 Depuis 1865, la jurisprudence fait preuve d'une constance remarquable en matière de reconnaissance de l'égalité entre les associés, qu'ils soient apporteurs en capital ou apporteurs en industrie. Cependant, la formulation parfois confuse de certaines lois suffit à semer le trouble. Dans cet arrêt de la 1ère chambre civile du 30 mars 2004, la Cour de cassation se veut de préciser l'application de l'article 1844-5 du Code civil dans le cas de la dissolution d'une société civile professionnelle d'huissiers. [...]
[...] En l'espèce, Mme Y n'aurait donc pas d'influence sur la possible dissolution de la société, mais devrait également renoncer aux droits des associés comme par exemple le doit de participer aux décisions collectives que lui confère l'article 1844 al. 1er. L'apporteuse en industrie ne serait, par conséquent, plus liée non plus aux obligations caractéristiques des associés, telles que la participation aux pertes, prescrite dans l'article 1844-1 al du Code civil. Mme Y serait donc complètement exclue de la société créée avec M. [...]
[...] On tente cependant aujourd'hui, à pouvoir faire estimer par les autres associés, la valeur que représente un apport en industrie, afin de permettre son incorporation dans le capital social, lorsque l'actif social est très fortement lié aux activités des associés. Cette solution semblerait mettre un terme définitif à la confusion qui règne à la lecture de l'article 1844-5 du Code civil concernant la qualité d'associé de l'apporteur en industrie. [...]
[...] Il est également convenu le même jour entre M. X et Mme Y que cette dernière s'engageait à racheter à M. X , dans le délai d'un an, un tiers de ses parts. Mme Y n'ayant pas respecté son engagement, M. X décide, en 1999, de solliciter la dissolution de la société civile sur le fondement de l'article 1844-5 du Code civil qui donne à l'associé qui tient "toutes les parts sociales en une seule main" la possibilité de demander la dissolution de la société. [...]
[...] C'est ce que la Cour d'appel conclua, en qualifiant M. X "associé unique". Cependant, et la contradiction est là, Mme Y a été active pendant 9 années au sein de la société, en tant qu'associée, et était reconnue comme telle par son coassocié M. X . C'est pour éclaircir cette ambiguïté, que la Cour de Cassation choisit de s'éloigner d'une lecture stricte de l'article 1844-5, pour en adopter une interprétation plus nuancée, en faveur de l'apporteur en industrie. II. La voie de l'interprétation choisie par la Cour de cassation en faveur de l'apporteur en industrie Afin d'appliquer l'article 1844-5 du Code civile le plus équitablement pour les deux parties, la Cour de cassation tente de fonder son interprétation sur la volonté originelle du législateur (A.). [...]
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