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Le principe de proportionnalité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel

La proportionnalité peut être considérée de deux manières : elle est un principe mais aussi une méthode, méthode qui permet d'appréhender les atteintes pouvant être faites à l'encontre de la Constitution, norme suprême de droit interne.

Conseil Constitutionnel

Conseil Constitutionnel

Cette proportionnalité est, de ce fait, utilisée dans le cadre de la question prioritaire de constitutionnalité (dite QPC) de même que dans le cadre du contrôle de conventionnalité relativement aux droits et libertés fondamentaux. Toutefois ce n'est pas une méthode propre au Conseil constitutionnel puisque le juge administratif suprême, le Conseil d'Etat, en fait usage avant le Conseil constitutionnel ainsi que pour les autres cours constitutionnelles étrangères et la Cour européenne des droits de l'homme.

Toutefois, cette méthode prête le flanc à la critique dans la mesure où elle commande au juge de définir un certain seuil de violation, seuil à partir duquel la violation en cause est (ou non) constitutive d'une illicéité. Il est donc dit que le juge utilise un curseur mais ce dernier varie en fonction du droit/liberté concerné en usant, alors, d'une appréciation purement subjective et qui implique un certain jugement de valeur concernant ce même droit/cette même liberté. C'est par ailleurs le cas concernant le contrôle de constitutionnalité au regard de certains droits et certaines libertés. Or, à nouveau, cette méthode comporte un réel risque : celui du passage d'un contrôle de licéité à celui d'un contrôle d'opportunité puisque ce contrôle implique de considérer les motifs qui justifient l'atteinte portée aux droits et aux libertés le tout, en s'intéressant à l'intention même du législateur, mettant en balance cette intention au degré de violation du droit/de la liberté concerné.


Le principe de proportionnalité

Dans de nombreuses constitutions contemporaines, le législateur dispose de la tâche d'organiser mais aussi de réguler les droits et les libertés fondamentales. Cela ressort notamment, en France, de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui prévoit que les droits et les libertés s'exercent dans le cadre de la loi, de même que dans l'article 34 de la Constitution de 1958, en son alinéa premier.

Toutefois, ces régulations des droits et des libertés ne sont pas arbitraires dans la mesure où les parlementaires doivent respecter par exemple des objectifs, des motifs et poursuivre des buts, qui sont d'ailleurs plus ou moins précis selon les constitutions. Il n'en demeure pas moins que dans le cadre de la constitution française, ces objectifs ne sont pas expressément nommés puisqu'il est par exemple fait référence à un grande notion, celle d'ordre public. C'est en ce sens que le Constitutionnel dégagea de la norme fondamentale française des objectifs à valeur constitutionnel qui permettent la limitation aux droits et aux libertés à l'image, entre autres, de la sécurité des personnes. En outre, dans le cadre du contentieux de la QPC, ces mêmes objectifs ne sont pas suffisants pour qu'ils soient rattachés à une violation d'un droit ou d'une liberté qui serait garanti par la norme suprême. Il faut en outre invoquer certains objectifs à valeur constitutionnel à la violation d'un droit ou d'une liberté garanti par la Constitution.

C'est en ce sens que la technique même du contrôle de proportionnalité met en oeuvre ces divers objectifs et buts dont le législateur constitue le "débiteur", de même que d'autres objectifs n'ayant pas, pour leur part, de valeur constitutionnelle.


Un instrument au service du pouvoir juridictionnel

Le principe de proportionnalité est donc un instrument au service du pouvoir juridictionnel. Le modèle même de l'Etat de droit constitue le seul système légitime qui implique, dans la pratique, que l'ensemble des actes qui émanent des pouvoirs publics puissent être confrontés aux normes supérieurs mais aussi à la protection dont doivent bénéficier les droits et les libertés de ce type de modèle. Il y a donc la combinaison, en pareil cas, d'un principe de légitimité et un principe de constitutionnalité et de la hiérarchie des normes. Cela conduit, finalement, à redéfinir la fonction juridictionnelle, et donc, l'office du juge en tant que garant de l'Etat de droit. Même si l'article 66 de la Constitution érige le juge judiciaire en tant que gardien des libertés individuelles, le juge administratif et le juge constitutionnel dispose de missions toute aussi importante dans la mesure où chacune des juridictions dans l'ordre interne français dispose d'un monopole du contrôle juridictionnel dans son domaine concernant les actes des pouvoirs publics.

De même, le juge ordinaire, qu'il soit judiciaire ou administratif, constitue le juge de la conventionnalité de la loi ; dans cette fonction, le juge ordinaire peut faire prévaloir la garantie des droits et des libertés fondamentaux face à une loi, norme interne, qui y porterait en effet atteinte.

Ainsi, on comprend que le concept de proportionnalité est en réalité rattaché à une technique juridictionnelle, et donc, à un raisonnement consistant à analyser le contenu même de la norme et à identifier dans son contenu un objectif visé par l'auteur de la norme (le législateur) et des moyens qui sont mis en oeuvre de manière à atteindre ledit objectif. Il faut ensuite confronter les deux éléments susmentionnés au degré même de la limitation apportée aux droits et aux libertés concernés.


Un instrument de concrétisation du principe de constitutionnalité

De ce terme "concrétisation", il faut en réalité entendre l'examen des éléments concrets de la décision de l'autorité fait par le juge, que cette autorité soit législative ou administrative. Il ne s'agit donc plus d'une conformité "simple" à une vision purement abstraite des principes de légalité et des principes de constitutionnalité. C'est en ce sens que Xavier Philip considère cette concrétisation comme étant nécessaire à l'office du juge administratif suprême (le Conseil d'Etat) et du Conseil constitutionnel en tant que garants des droits et des libertés.

Il faut, en outre, noter que l'idée de la proportionnalité se retrouve au sein du bloc de constitutionnalité. Il en est par exemple question dans le cadre du principe de légalité des délits et des peines, en matière pénale.

C'est à l'occasion de la décision du Conseil constitutionnel du 21 février 2008 sur la rétention de sureté que le Conseil va aboutir à un certain perfectionnement de la technique du contrôle en visant les trois composantes du test de proportionnalité dans le cadre de l'examen du contenu des lois auquel il se livre dans sa pratique. C'est en ce sens que dans la décision susvisée, aux considérants 14 à 23, celui-ci fait référence tout d'abord à l'adaptation, à la nécessité et enfin à la proportionnalité.

Dans le cadre de la proportionnalité au sens strict du terme, le Conseil constitutionnel français effectue un bilan coûts/avantages lui permettant alors de s'assurer que la disposition en cause comporte un certain nombre de garantie pour que celle-ci soit considérée comme proportionnée. Il se livre alors à un contrôle relatif aux autorités qui interviennent lors de la mise en oeuvre de la procédure, et à l'intervention du juge dans le dispositif. Il se penche alors sur l'ensemble des garanties présentes et celles qui devraient l'être. Le juge peut alors aller très loin dans le contrôle du contenu de la loi, surtout en matière de QPC puisque la loi est appliquée et qu'elle a pu, concrètement, violer des droits et des libertés fondamentaux.

Ce test de la proportionnalité et l'utilisation qui en est faite par le juge constitutionnel sont, en réalité, placés au coeur même de la garantie des droits et des libertés.

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