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Possible censure du Conseil Constitutionnel sur la réforme des retraites

Trois recours ont été déposés devant le Conseil constitutionnel afin d'emporter la censure des sages concernant la réforme des retraites, dont l'adoption fut fortement décriée aussi bien par la classe politique que par la population. Les sages devront se prononcer afin que la loi puisse utilement entrer, ou non, en vigueur. Décryptage.

Conseil Constitutionnel et président actuel Laurent Fabius

Crédit Photo : © Magali Delporte pour le JDD

Différents griefs portés contre cette réforme

Divers griefs ont été portés contre cette réforme par les différents groupes ayant saisi le Conseil constitutionnel. Nous pouvons notamment retenir qu’il est fait grief au Gouvernement d’avoir usé d’un projet de loi de financement rectificatif de la Sécurité sociale (ci-après PLFRSS) ainsi que de l’article 47-1 de la Constitution qui restreint la durée des débats à cinquante jours ; la présence de « cavaliers sociaux » est également déplorée par les députés de la Nupes.

Se pose notamment la question de savoir pourquoi l’utilisation d’un tel PLFRSS fait actuellement débat ? « Détournement de procédure » pour les uns, « véhicule législatif inadapté » pour les autres, les qualificatifs fusent chez les détracteurs de cette réforme. Pourquoi le Gouvernement n’a-t-il pas utilisé la procédure législative ordinaire ? En vérité, il faut comprendre que le PLFRSS constitue un projet de loi qui doit fixer l’équilibre financier dans l’ensemble des branches de la Sécurité sociale. Or ce dernier peut être révisé à plusieurs reprises par le biais des PLFRSS échappant ainsi à la règle restrictive contenue à l’article 49, al. 3, de la Constitution qui implique qu’il ne peut en être fait usage plus d’une fois par session parlementaire.
Ce qui pose problème ici réside dans le fait que même si certaines dispositions contenues dans le PLFRSS auront bien un impact sur le budget de la Sécurité sociale, celui-ci est principalement mis à l’œuvre afin de réformer les retraites. Toutefois la loi de financement passée ne doit affecter le budget que pour l’année 2023 : sous ce rapport, le Conseil d’Etat a déjà pu noter que les effets de la réforme décriée ne seront visibles qu’à la fin de l’année 2023 et se poursuivront bien au-delà du 31 décembre de la même année.

Quid de la clarté et de la sincérité du débat parlementaire ?

Tout d’abord, l’usage des dispositions de l’article 47-1 de la Constitution pose question. Cet article s’applique dans le cadre des textes de nature budgétaire et permet de limiter les débats aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat (et en vertu de son alinéa trois, en les limitant à cinquante jours). Cette mise en œuvre n’a pas permis aux députés de statuer sur la réforme en première lecture, principalement du fait du nombre conséquent d’amendements déposés. L’usage fait des délais contenus dans cet article a in fine résulté sur une transmission quasi immédiate du texte aux sénateurs, avant d’être renvoyé à une commission mixte paritaire, et, finalement à une adoption du texte à l’Assemblée nationale conséquemment à l’actionnement de la procédure de l’article 49, al. 3, de la Constitution.
Ces délais limités n’ont cependant pas été imaginés par les constituants pour permettre au Gouvernement d’arguer d’une fausse urgence à réformer les retraites, mais bien, à l’origine, pour répondre utilement et efficacement à une nécessité pour la Sécurité sociale. De fait, cet usage de l’article 47-1 de la Constitution contrevient à l’exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité des débats parlementaires…
Aussi, le Gouvernement a fait usage de bon nombre de règles procédurales qui, bien que véritablement conformes au droit constitutionnel, mises bout à bout, ne peuvent laisser les citoyens indifférents. Ces règles ont eu pour conséquence de restreindre le temps de parole et d’impacter négativement les débats parlementaires (par exemple, la déclaration d’irrecevabilité de certains amendements conformément à l’article 44 de la Constitution, ou encore le vote bloqué du texte au Sénat conformément à l’article 44, al. 2 et 3, du règlement intérieur du Sénat, sans même mentionner l’énième utilisation du troisième alinéa de l’article 49 susmentionné). Au surplus quand bien même la norme constitutionnelle suprême fut respectée, il n’en reste pas moins que les députés de la Nation n’ont pu se prononcer effectivement sur ce texte…

Quid des « cavaliers sociaux » ?

Le questionnement autour de la notion de « cavaliers sociaux » a également surgi lors du difficile cheminement législatif de ce projet de réforme. Cette notion implique que des dispositions sont insérées dans des lois de financement de la Sécurité sociale en dépit d’une interdiction stricte contenue aussi bien à l’article 34, al. 20, de la Constitution qu’à l’article 1er de la Loi organique relative au financement de la sécurité sociale. Autrement dit, ces dispositions ne relèvent pas du domaine desdites lois et ne contiennent pas d’impacts financiers au regard du budget de la Sécurité sociale.
Le Président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius, a d’ailleurs fait savoir que les sages seront particulièrement attentifs quant la présence de ces « cavaliers sociaux » dans le texte soumis à examen.

Peut-on clairement imaginer une censure générale de la réforme ?

La censure générale de la loi soumise à examen devant les sages est imaginable. En effet le Conseil constitutionnel pourrait tout à fait retenir que la procédure législative fut entachée de défauts tels qu’ils devraient nécessairement résulter sur une censure totale de la réforme, voire que l’exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité des débats fut dévoyée de sorte qu’elle devrait emporter censure complète de la loi.
Cependant il nous faut ici relativiser notre propos puisque la loi en cause pourrait être partiellement censurée, cette censure tenant surtout à la présence de « cavaliers sociaux ». Il apparait opportun de noter que les griefs tenant à une procédure dévoyée pourraient ne pas trouver écho favorable chez les sages dans la mesure où les griefs portés contre la loi sont surtout d’une nature politique et non réellement d’une nature juridique.
Ce ne sont bien sûr que des hypothèses qui devront, ou non, être vérifiées et validées par le Conseil constitutionnel dont nous attendons d’ici peu la décision…

Références
https://www.lexpress.fr/politique/retraites-le-conseil-constitutionnel-va-t-il-retoquer-les-cavaliers-budgetaires-VZ2CNVXQCRBQVN3QGJO24NBGEQ/
https://www.vie-publique.fr/loi/287916-reforme-des-retraites-2023-projet-de-loi-plfss-rectificatif
https://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/reforme-des-retraites-la-decision-tres-attendue-du-conseil-constitutionnel-1918975
https://www.20minutes.fr/politique/4029229-20230327-reforme-retraites-conseil-constitutionnel-attendu-rendez

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