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Les mesures de rétorsion à l'encontre de la Hongrie - Droit européen

La Commission européenne a décidé d'engager une procédure qui pourrait in fine aboutir à la privation de fonds européens au profit de la Hongrie. Qu'en est-il ?

Mesures de rétorsion contre la Hongrie

Credit Photo : Viktor Orban, letemps.ch

Il y a quelques jours se tenaient les élections législatives en Hongrie, élections qui ont résulté sur la victoire du Premier ministre sortant, Viktor Orbán. Toutefois quelques jours plus tard, la Commission européenne a décidé d’engager une procédure qui pourrait in fine aboutir à la privation de fonds européens au profit de la Hongrie, si celle-ci (comme tout Etat membre de l’Union européenne) se rendait coupable d’une violation avérée de l’Etat de droit. De quoi s’agit-il exactement ? Décryptage.


Le contexte de cette mesure absolument inédite en droit de l’Union européenne

Après la quatrième victoire d’affiliée du Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, la Commission européenne a pris la décision de mettre en mouvement une procédure absolument inédite en droit de l’Union européenne, à l’encontre de la Hongrie. Cette procédure consiste, en quelques mots, à priver un Etat membre de l’organisation internationale des fonds européens pour le cas où il était avéré que celui-ci a en effet violé l’Etat de droit.
Plus spécifiquement Ursula von der Leyen, la Présidente de la Commission européenne, a annoncé le 5 avril dernier, devant le Parlement européen, la mise en action de cette procédure qui viserait à refuser à la Hongrie le versement de fonds européens du fait des nombreuses accusations de corruption. Outre ces accusations de corruption, d’autres accusations semblent résider dans des problématiques rencontrées lors de la passation de marchés publics, ou encore des conflits d’intérêts. Néanmoins la Pologne, elle aussi souvent visée par les autorités européennes qui la critiquent sur ces problématiques liées à l’Etat de droit et ses violations, ne fait pour l’heure pas encore l’objet de cette procédure. Ces fonds versés représentent des sommes conséquentes aussi bien pour la Hongrie que la Pologne, puisque ces deux Etats membres en constituent les principaux bénéficiaires.
La Présidente de la Commission européenne a également fait savoir que le plan de relance hongrois se trouve gelé dans la mesure où la corruption ne semble pas être combattue de manière suffisante et efficace par les autorités hongroises.  
En fin de compte le 5 avril, les autorités européennes ont porté à la connaissance des autorités hongroises compétentes que le mécanisme en question, mis en mouvement pour la toute première fois à l’encontre d’un Etat membre, leur sera notifié par une lettre de mise en demeure dont la teneur est pour le moment inconnue. La réception de cette lettre de mise en demeure constitue le point de départ de la vie juridique de cette procédure.


Un mécanisme de « conditionnalité » vivement critiqué

C’est le 16 décembre 2020 que le Parlement européen et le Conseil ont adopté le règlement 2020/2092 « relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union ». C’est ce règlement qui fut tant critiqué par les autorités hongroises et polonaises. Revenons sur ce mécanisme.
Ces deux Etats membres ont en fait chacun formé un recours en annulation auprès de la Cour de justice de l’Union européenne. Cette dernière a rendu sa décision le 16 février dernier, décision dans laquelle elle a rejeté ces recours intéressant ce mécanisme dit de conditionnalité, qui prévoit que le versement de financements issus du budget européen est soumis au respect de l’Etat de droit par l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne (cf. CJUE, 16 février 2022, C-156/21, Hongrie c/ Parlement et Conseil ; C-157/21, Pologne c/ Parlement et Conseil). Les juges de la Cour de justice ont donc considéré que le règlement en cause était bien conforme au droit de l’Union européenne.


Une suspension ou une réduction du versement des fonds européens : de quoi s’agit-il ?

Pour bien comprendre la nature des sanctions qui découlent de ce mécanisme, entré en vigueur en janvier 2021, il nous faut retenir que dès lors que sont constatées des violations de l’Etat de droit, qui porteraient atteinte ou qui risqueraient de porter atteinte aux finances de l’Union européenne, l’Etat membre qui s’en est rendu coupable se voit geler tout versement desdits fonds européens. Toutefois ces violations qui porteraient ou risqueraient de porter une telle atteinte doivent l’être « d’une manière suffisamment directe ».
De plus il apparait opportun de préciser ici que cette suspension du versement de ces fonds, ou bien encore une réduction de ce versement, découlent nécessairement d’une proposition de la Commission européenne ; elles sont par ailleurs toutes deux soumises à l’approbation d’au moins quinze Etats membres de l’Union européenne et ces Etats membres doivent en outre représenter au minimum 65% de la population totale de l’Union. La procédure découlant de ce mécanisme est toutefois longue puisqu’il est estimé qu’elle prendra entre six et neuf mois pour être éventuellement complétée.  
Comme précisé ci-dessus, la mise en mouvement de ce mécanisme de conditionnalité a été rendue possible par l’arrêt rendu en février dernier par les juges de Luxembourg le validant d’un point de vue juridique. Sous ce rapport il convient également d’observer que les Etats membres avaient décidé de s’abstenir de toute action avant que la légalité de ce mécanisme ne soit juridiquement reconnue. Ayant rejeté les recours en annulation et donné leur feu vert, la procédure a finalement pu être actionnée malgré des impatiences notables de la part de nombreux eurodéputés depuis plusieurs mois.
A cet égard, la Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, avait même déclaré qu’elle et ses collègues attendaient que « la Commission [applique finalement] le mécanisme de conditionnalité ». Ursula von der Leyen, pour expliquer la certaine lenteur de la Commission européenne à adresser cette situation avait précisé que les élections législatives ayant eu lieu le 3 avril dernier en Hongrie avait contraint la Commission à attendre, afin de ne pas être accusée d’ingérence dans les affaires internes hongroises. Les élections passées et les résultats finaux connus, la Commission européenne a donc pu intervenir « avec détermination », comme sa présidente l’avait alors assurée.
Reste à observer le déroulement de la procédure et voir si celle-ci sera suivie d’effets.


Références
https://www.lesechos.fr/monde/europe/etat-de-droit-bruxelles-engage-des-mesures-de-retorsion-contre-la-hongrie-1398678
https://www.lemonde.fr/international/article/2022/04/05/l-union-europeenne-lance-contre-la-hongrie-la-procedure-conditionnant-le-versement-des-fonds-europeens-au-respect-de-l-etat-de-droit_6120723_3210.html
https://www.france24.com/fr/europe/20220405-l-ue-lance-la-proc%C3%A9dure-qui-pourrait-priver-la-hongrie-de-fonds-europ%C3%A9ens
https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=254061&pageIndex=0&doclang=FR&mode=req&dir=&occ=first&part=1&cid=3553599

 

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