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Décision de dissolution de l'association Soulèvements de la terre

Alors même que la dissolution des Soulèvements de la Terre fut actée le 21 juin 2023, à la suite de l'actionnement de la procédure par le Ministre de l'Intérieur le 28 mars dernier, les avocats de ce collectif ont annoncé qu'un recours sera formé devant le Conseil d'Etat. Tentons d'y voir un peu plus clair. Décryptage.

Décision de dissolution de l'association Soulèvements de la terre

Crédit Photo : Logo Soulèvements de la Terre

Les raisons ayant amené à cette dissolution

Cette décision de dissolution fut actée à l’occasion du Conseil des ministres du 21 juin 2023. Olivier Véran, porte-parole du Gouvernement, a par ailleurs déclaré que ce qui fut sanctionné, en l’espèce, réside dans « le recours à la violence [qui] n’est pas légitime en Etat de droit. » Plus exactement, le décret de dissolution mentionne différentes actions menées par le collectif et qui ont amené à cette décision (il s’agissait surtout d’usage de la violence, d’agressions physiques perpétrées contre les forces de l’ordre, à l’occasion de sabotages ou encore de dégradations matérielles).
Les réactions ont été vives à la suite de cette décision, et, le soir même de nombreuses protestations avaient lieu dans des grandes villes de France. Par ailleurs, les avocats de ce collectif ont immédiatement annoncé qu’un recours sera déposé devant le Conseil d’Etat afin de protester contre cette décision de dissolution, soulignant que cette décision méconnait non seulement « [les] libertés fondamentales » mais aussi que le Gouvernement ne dispose pas « de base juridique solide » à l’effet de justifier une telle décision. Aussi, pour l’une des avocates des Soulèvements de la Terre, il conviendra de combattre la dénomination de « groupement de fait » puisqu’il s’agit pour celle-ci d’un « mouvement horizontal » et que du fait de cette nature particulière, il ne saurait valablement faire l’objet d’une telle décision de dissolution.
La veille de cette décision, Gérald Darmanin s’était exprimé au Palais Bourbon à ce sujet. Il a en effet déclaré qu’il n’est pas possible d’envisager des causes qui justifieraient l’usage de la violence contre les forces de l’ordre. Cette décision intervient quelques mois après le début de l’actionnement de la procédure de dissolution, le 28 mars 2023 suite à des affrontements d’une particulière violence dans les Deux-Sèvres, et qui avaient résulté sur de nombreux blessés aussi bien du côté des manifestants que des policiers et des gendarmes présents sur les lieux.


Quel est le cadre juridique des associations ?

Les associations et la loi 1901



Quel est le contenu de ce décret de dissolution ?

Ce décret de dissolution intervient en fait quelques jours après une manifestation à laquelle le collectif avait pris part en Loire-Atlantique, et qui avait pour objet de contrer l’exploitation du sable à des fins industrielles dans la région (une exploitation maraichère avait notamment été endommagée).
Ce décret dispose que le collectif revêt la nature d’un « groupement de fait », et que l’idéologie de ce dernier repose sur « l’action directe », c’est-à-dire des agissements extrêmes, notamment des violences envers les dépositaires de la force. Ce collectif se base également sur les réseaux sociaux qui leur permettent de diffuser largement leurs projets et les différents modes d’actions violents envisagés, aussi bien à l’encontre des personnes que des biens.

Commentaires d'arrêts de dissolution d'association :

Commentaire d'arrêt du Conseil d'Etat du 25 juillet 2008 : la dissolution de l'association nouvelle des Boulogne Boys

Commentaire d'arrêt CE, 25 juillet 2008 : la dissolution administrative d'une association

Les indignations des défenseurs des Soulèvements de la Terre

Avant même la décision de dissolution de ce collectif, les arrestations qui avaient suivi les manifestations avaient fait réagir de nombreuses voix de la gauche ainsi que différentes associations et mouvements. Par ailleurs, pour la cheffe du parti politique écologiste Europe Ecologie-Les Verts, Marine Tondelier, la seule motivation qui existe dans ce décret n’est que politique, et non juridique. Pour elle encore, les moyens de répression qui ont été dernièrement employés par l’Etat sont « surdimensionnés ».
L’Etat se tromperait de cible et devrait plutôt agir en faveur du climat et de sa protection. C’est en fin de compte le constat qui ressort de nombreux témoignages et déclarations qui ont suivi la publication de cette dissolution. Il s’agit pour les uns de l’usage, comme Jean-Luc Mélenchon d’un « arsenal [pourtant] prévu pour lutter contre les terroristes », pour les autres d’une incompréhension totale des enjeux liés aux changements climatiques.
Pour les députés de La France Insoumise, ce décret pose tout simplement la question de savoir si les libertés fondamentales, pourtant garanties par le texte constitutionnel suprême, ne sont pas bafouées par le Gouvernement ? Plus spécifiquement, il s’agit de la liberté de manifester et « [la liberté] de s’opposer à ce gouvernement » qui semble remise en cause. Pour Mathilde Panot, cheffe de file des Insoumis à l’Assemblée nationale, cette décision est absolument inédite en ce qu’elle constitue la toute première de l’histoire du pays à avoir pour résultat de « dissoudre un mouvement écologiste. » Elle aussi déplore l’utilisation de la loi du 24 août 2021, confortant le respect des principes de la République, loi qui par ailleurs avait été vivement critiquée et déplorée par ce groupe parlementaire à l’occasion de son examen au Parlement. Face à cette utilisation disproportionnée, elle a annoncé qu’une proposition de loi serait déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale afin que soient abrogées toutes les dispositions qui contreviendraient aux libertés associatives.
Pour sa part, la Ligue des droits de l’homme a déploré que différentes libertés soient finalement remises en cause à la suite de cette décision de dissolution : ces remises en cause touchent non seulement la liberté d’expression mais aussi la liberté de manifestation et enfin la liberté d’association ; les droits de la défense sont également fortement remis en cause selon ses représentants.
Si de nombreux acteurs ont dénoncé des violations sur le plan du droit national, Amnesty International France a pour sa part déclaré qu’il était nécessaire de procéder à un rappel « [des règles] du droit international » en la matière. Différents rassemblements ont été organisés et sont même prévus dans les jours à venir pour défendre ce que certains appellent une violation de l’Etat de droit et de la démocratie. Il reste pour l’heure à attendre ce qu’en dira le Conseil d’Etat dans une décision qui, s’il est effectivement saisi, sera très attendue.

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