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La décision rapportée tranche un conflit de jurisprudence entre la 1re et la 3e Chambre civile de la Cour de cassation quant à la nature, contractuelle ou délictuelle, de l'action en responsabilité du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant. Elle marque aussi une volonté de rupture avec l'application en la matière, faite par la 1re Chambre civile, de la notion de groupe de contrat. Sur la question plus large de la nature des actions susceptibles d'être exercées par le maître de l'ouvrage contre les personnes ayant participé à la construction, mais avec lesquelles il n'a pas de lien contractuel direct, l'Assemblée plénière tranche en faveur de la position de la 3e Chambre civile, plus traditionnelle, après l'avoir écartée en 1986. S'agit-il d'un véritable revirement de jurisprudence, alors que deux décisions de l'Assemblée plénière tranchaient dans le sens de la position de la 1re Chambre civile ? Le premier conflit de jurisprudence entre les deux chambres est né en 1983. La solution de la 1re Chambre civile donnait une action directe en responsabilité, nécessairement contractuelle, contre le fournisseur ou le fabricant des matériaux défectueux utilisés par l'entrepreneur. La solution traditionnelle qui donne une action directe, nécessairement contractuelle au sous-acquéreur contre tous les vendeurs successifs de la chose jusqu'au vendeur initial, était ainsi étendue au profit du maître de l'ouvrage. S'agissant du maître de l'ouvrage, il y avait au moins deux contrats hétérogènes, et non une succession homogène de contrats. Un contrat d'entreprise était une des conventions intermédiaires. Mais il y avait, dans les deux situations, fourniture d'un objet matériel, et la transmission de l'action en responsabilité pouvait ainsi être rattachée à titre d'accessoire à celle de l'objet. La jurisprudence antérieure autorisait seulement, dans l'hypothèse d'une action exercée par le maître de l'ouvrage contre le fournisseur ou le fabricant des matériaux défectueux utilisés par l'entrepreneur, une action délictuelle fondée sur l'inexécution des obligations contractuelles du vendeur initial envers son propre acheteur mais, en principe, déduite d'une « faute envisagée en elle-même, indépendamment de tout point de vue contractuel ». Cependant, la 3e Chambre civile a admis dès 1963 que les acquéreurs successifs d'un immeuble pouvaient exercer contre les constructeurs les actions en garantie décennale et biennale fondées sur les art. 1792 et 2270 c.civ., tandis qu'à l'égard de l'action du maître de l'ouvrage contre le fournisseur de matériaux défectueux ou non conformes, elle n'admettait que l'existence d'une action délictuelle à partir du principe de l'effet relatif du contrat, et sur le fondement de son opposabilité. La 1re Chambre civile n'autorisait qu'une action exclusivement contractuelle. Ce conflit a été tranché le 7 fév. 1986 par l'Assemblée plénière en faveur de la solution admise par la 1re Chambre civile : « Le maître de l'ouvrage, comme le sous-acquéreur, jouit de tous les droits et actions attachées à la chose qui appartenaient à son auteur, qu'il dispose donc à cet effet contre le fabricant d'une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée ». Et la 3e Chambre civile s'est ralliée à cette solution dans une décision du 15 février 1989. Cette jurisprudence allait dans le sens d'un courant doctrinal qui insistait sur la nécessité de soumettre au même régime de la responsabilité contractuelle tous ceux qui avaient souffert du dommage seulement parce qu'ils avaient un lien avec le contrat initial. Selon ce courant doctrinal, la responsabilité contractuelle doit obéir à un régime spécifique tenant compte des prévisions des parties, et un recours à la responsabilité délictuelle fondée sur une qualification de tiers revenait à déjouer ces prévisions. L'arrêt du 12 juillet 1991 rendu par l'assemblée plénière consacre une position différente à propos de la nature de l'action en responsabilité du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant de l'entrepreneur et non plus contre le fournisseur de matériaux utilisés par de l'entrepreneur. La Cour de cassation autorisait jusqu'à récemment le maître de l'ouvrage à agir sur le fondement de la responsabilité délictuelle contre le sous-traitant qui avait effectué de façon défectueuse les travaux que lui avait confiés l'entrepreneur principal. La Chambre commerciale, le 17 fév. 1987, a cependant jugé que dans cette hypothèse, l'action ne pouvait être délictuelle. On y a vu généralement une application du principe posé par l'assemblée plénière en 1986, ce qu'a confirmé la position de la 1re Chambre civile. Le 8 mars 1988, elle a posé en principe « que dans le cas où le débiteur d'une obligation contractuelle aurait chargé une autre personne de l'exécution de cette obligation, le créancier ne dispose contre cette personne que d'une action de nature nécessairement contractuelle, qu'il peut exercer directement dans la double limite de ses droits et de l'étendue de l'engagement du débiteur substitué ». Dans un arrêt du 21 juin 1988, la 1re Chambre civile a posé le principe selon lequel, « dans un groupe de contrats, la responsabilité contractuelle régit nécessairement la demande en réparation de tous ceux qui n'ont souffert du dommage que parce qu'ils avaient un lien avec le contrat initial, qu'en effet, dans ce cas, le débiteur ayant pu prévoir les conséquences de sa défaillance selon les règles contractuelles applicables en la matière, la victime ne peut disposer contre lui que d'une action de nature contractuelle, même en l'absence de contrat entre eux ».La solution était fondée expressément sur la notion de groupe de contrats et sur la nécessité de respecter les prévisions du débiteur, pour laquelle elle est fondée sur le courant doctrinal qui a conduit en 1986 l'Assemblée plénière à écarter l'action délictuelle dans les relations entre le maître de l'ouvrage et le fournisseur de matériaux défectueux. Le 22 juin 1988, la 3e Chambre civile réfutait cette position et affirmait que « l'obligation de résultat d'exécuter des travaux exempts de vices, à laquelle le sous-traitant est tenu vis-à-vis de l'entrepreneur principal, a pour seul fondement les rapports contractuels et personnels existant entre eux et ne peut être invoquée par le maître de l'ouvrage, qui est étranger à la convention de sous-traitance ». La question de la nature de l'action du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant devait ainsi donner lieu à un arrêt de l'Assemblée plénière. En l'espèce, un entrepreneur de construction avait chargé un sous-entrepreneur travaux de plomberie qui, après l'expiration du délai décennal prévu par l'article 2270 du Code civil, se révélèrent défectueux. Poursuivi par le maître de l'ouvrage, qui se trouvait forclos dans son action contre l'entrepreneur principal, le plombier opposa précisément la même forclusion et la Cour d'appel de Nancy lui donna gain de cause en reprenant mot pour mot la formule qu'avait employée la 1re Chambre civile dans son arrêt du 8 mars 1988. De cette affirmation de principe, la cour déduisit que « le sous-traitant pouvait opposer au maître de l'ouvrage tous les moyens de défense tirés du contrat de construction conclu entre ce dernier et l'entrepreneur principal ainsi que des dispositions légales qui le régissent, en particulier la forclusion décennale ». Le premier président de la Cour de cassation renvoya l'affaire devant l'Assemblée plénière qui cassa l'arrêt par une décision très brève, visant l'article 1165 du Code civil et reprochant à la cour d'appel d'avoir violé ce texte en appliquant la forclusion décennale à l'action du propriétaire de l'immeuble contre le plombier « alors que le sous-traitant n'est pas contractuellement lié au maître de l'ouvrage ». En fait, l'Assemblée plénière condamne à la fois la position de la 1re Chambre civile au profit de celle de la 3e Chambre civile quant à la nature de l'action en responsabilité du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant, et la notion de groupe de contrats comme fondement d'une action contractuelle directe en responsabilité. La censure aurait pu être justifiée par des motifs propres au droit immobilier, mais la généralité des formules employées et la condamnation explicite des motifs de l'arrêt attaqué, et donc de ceux de la 1re Chambre civile, suffisent à montrer que la portée de l'arrêt rapporté n'est pas limitée au domaine de la construction immobilière. Pour les mêmes raisons, la portée de cet arrêt n'est pas limitée à l'action du maître de l'ouvrage contre le sous-traitant, ni même à l'action exercée contre une partie à l'encontre du sous-contractant substitué à son débiteur initial. L'assemblée plénière a entendu condamner une construction juridique dangereuse sur le plan de la justice contractuelle et de la sécurité juridique, de même qu'elle a entendu condamner l'application de la notion de groupe de contrats appliquée à la détermination de la nature contractuelle ou délictuelle de l'action en responsabilité et, du même coup, faire obstacle aux extensions du domaine de cette action directe, nécessairement contractuelle, prônée par une partie et de la doctrine et consacrée par la 1re Chambre civile. La notion de groupe de contrat a pour particularité d'avoir un domaine difficile à délimiter, et dont l'extension de domaine peut présenter des conséquences excessives parce qu'exagérément contraires au principe de l'effet relatif du contrat. L'action directe remet en cause la portée exacte du principe de l'effet relatif du contrat. La notion de groupe de contrats apportait un fondement juridique nouveau à cette action, d'où résultait un accroissement de son domaine et une altération de son régime. L'assemblée plénière réduit de façon importante le domaine de l'action contractuelle directe en responsabilité au profit de l'action délictuelle. Il s'agit donc dans une première partie de présenter la notion de groupe de contrat et son application à la détermination du domaine de l'action contractuelle directe en responsabilité, ainsi que les effets néfastes de cette application. Puis, il restera à s'interroger sur la valeur de la solution retenue par défaut, à savoir la transmission de l'action contractuelle directe à titre d'accessoire de la chose.
[...] Conséquences néfastes de l'application de la notion de groupe de contrats comme justification d'une action contractuelle directe en responsabilité Apparaît alors une importante difficulté : plusieurs contrats sont intervenus entre le demandeur et le défendeur. Il s'agit donc de déterminer celui dont le régime propre s'appliquera à la demande Le choix du régime du contrat du défendeur ou de celui du demandeur. Demandeur et défendeur sont parties immédiates à des conventions distinctes dont le contenu et la qualification juridique peuvent différer. La transmission de l'action avec la chose conduit logiquement à faire prévaloir le contrat conclu par le défendeur avec son cocontractant immédiat. [...]
[...] Pour les mêmes raisons, la portée de cet arrêt n'est pas limitée à l'action du maître de l'ouvrage contre le sous- traitant, ni même à l'action exercée contre une partie à l'encontre du sous- contractant substitué à son débiteur initial. L'assemblée plénière a entendu condamner une construction juridique dangereuse sur le plan de la justice contractuelle et de la sécurité juridique, de même qu'elle a entendu condamner l'application de la notion de groupe de contrats appliquée à la détermination de la nature contractuelle ou délictuelle de l'action en responsabilité et, du même coup, faire obstacle aux extensions du domaine de cette action directe, nécessairement contractuelle, prônée par une partie et de la doctrine et consacrée par la 1re Chambre civile. [...]
[...] Une autre difficulté est posée à ce fondement, celle de la qualité des parties et du droit auquel elles sont soumises. Ces interrogations non solutionnées, ou seulement en partie ont sans doute conduit l'Assemblée plénière à revenir à une solution sinon plus ancienne, plus rigoureuse au niveau des garanties accordées aux contractants des divers contrats du groupe. II. La qualité des parties et un choix contestable quant à la transmission de l'action contractuelle directe à titre d'accessoire de la chose faisant l'objet des contrats successifs La prise en considération de la qualité des parties semblerait intéressante du point de vue de la sécurité juridique des sous-traitants et acheteurs successifs dans les chaînes et groupes de contrats. [...]
[...] Et c'est la solution qui a été affirmée par la 1re Chambre civile pour justifier l'action directe nécessairement contractuelle de tous ceux qui n'ont souffert du dommage que parce qu'ils avaient un lien avec le contrat initial Il était possible aussi de justifier à partir de la notion de groupe de contrats, l'existence d'une action directe propre au sous-acquéreur contre les vendeurs successifs de la chose, en considérant que les ventes successives d'un même objet constituent une chaîne de contrats établissant une relation contractuelle directe entre les vendeurs et acheteurs successifs. La transmission de l'action en garantie ou en responsabilité contractuelle au sous-acquéreur était alors surabondante. D'autre part, la notion de groupe de contrat entendue au sens d'ensemble contractuel visant à la réalisation d'un but commun permettait d'élargir encore le domaine des effets du contrat. Pour cela, il suffisait que toutes les parties aux contrats aient concourues à la réalisation d'une fin commune (Cass. civ. 1re juin 1988). [...]
[...] L'Assemblée plénière fait état, dans les arrêts rendus le 7 fév de ce que le sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur en qualité d'ayant droit de son propre vendeur. La recherche d'un accord de volonté plus ou moins factice est inutile dans le fondement objectif de la transmission. Mais le principe mêmes d'une transmission de l'action appartenant au vendeur intermédiaire est contestable. En effet, ce principe ne peut justifier l'ensemble des solutions en la matière. [...]
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