Quelles sont les conditions de la nullité d’un licenciement dans le cadre d’un harcèlement moral ?
Par principe, le salarié est protégé. Les dispositions de l’article L.1152-2 du Code du travail prévoient qu’il n’est pas possible qu’un salarié soit sanctionné, licencié ou bien fasse l’objet d’une mesure discriminatoire lorsqu’il a subi ou bien lorsqu’il a refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral.
La protection du salarié prend en vérité la forme de la nullité du licenciement dès lors que celui est prononcé du fait du harcèlement subi ou refusé par le salarié concerné (cf. dispositions de l’article L. 1152-3 du Code du travail).
C’est en fin de compte au gré des différentes décisions rendues par la Cour de cassation que les contours de cette protection ont été précisés et ce, par des arrêts rendus précédemment.
Des conditions cumulatives devant impérativement être rencontrées
Dans notre cas d’espèce ici jugé et rapporté par la Chambre sociale de la Cour de cassation, en date du 9 avril 2025, les juges ont décidé de retenir et de formuler deux conditions cumulatives devant impérativement être rencontrées à l’effet de pouvoir valablement frapper de nullité le licenciement d’un salarié qui aurait été victime d’un harcèlement moral.
Quelles sont donc ces deux conditions posées par les juges ?
Tout d’abord, il convient de noter que le salarié en question doit avoir effectivement subi ou bien effectivement refusé de subir ce type de harcèlement (la caractérisation de ce harcèlement passe par la rencontre des critères légaux posés en la matière).
En outre, les juges de la Chambre sociale de la Cour de cassation poursuivent en précisant que les juges du fond doivent avoir établi que le licenciement en question fut bel et bien motivé par l’employeur du fait que le salarié concerné a soit subi soit refusé de subir ce même type de harcèlement.
Il existe également un lien causal entre le licenciement en question et le harcèlement moral.
Quid du lien causal entre le licenciement et le harcèlement moral ?
Retenons pour débuter notre présent développement que ce lien causal doit être caractérisée en effet de manière explicite. Dans notre cas d’espèce ici jugé et rapporté, les juges de la Chambre sociale de la Cour de cassation souligne le fait que les juges du fond doivent impérativement caractériser ce lien causal entre le licenciement et le harcèlement moral. Cette condition résulte en vérité d’une lignée prétorienne établie précédemment par les juges de la Haute juridiction. En ce sens l’on peut retenir que la Cour de cassation a jugé qu’il résulte de dispositions du Code du travail susmentionnées que le licenciement d’un salarié qui a subi ou refusé de subir « des agissements répétés de harcèlement moral » sera nécessairement nul (cf. Cass. soc., 29 juin 2011, n-09-69.444).
Comment notre cas d’espèce opère-t-il un approfondissement de cette règle prétorienne ? En vérité notre arrêt rendu le 9 avril 2025 va plus loin dans la règle précédemment instaurée dans la mesure où les juges de la Cour de cassation ont décidé de censurer les juges du second degré en ce sens précisément où ces derniers n’ont pas procédé à la caractérisation d’un lien de causalité entre le licenciement et le harcèlement moral.
Comment s’exprime donc le lien causal en question ?
Ce sont les différentes décisions rendues en la matière qui permettre d’illustrer les différents cas où ce lien peut s’exprimer. L’on peut alors retenir que celui-ci s’exprime par une mention explicite dans une lettre de licenciement (Cass. soc., 06 décembre 2011, n-10.18-440), ou encore dès l’instant où le comportement que reproche l’employeur au motif de son licenciement est en vérité la « réaction au harcèlement moral » dont ce dernier est la victime (cf. Cass. soc., 10 juillet 2019, n-18-14.317).
Que se passe-t-il si ce lien causal n’est pas établi ?
Dans notre cas d’espèce ici jugé et rapporté par la Chambre sociale de la Cour de cassation, il est primordial de retenir que le seul fait d’affirmer que le licenciement moral existe ne peut à lui seul permettre la nullité du licenciement.
Ici, les juges de la Chambre sociale souligne le fait que pour le cas où un salarié a subi un harcèlement moral, cela ne revient absolument pas à dire que celui-ci fut licencié car il a subi lesdits agissements (cf. Cass. soc., 18 janvier 2011, n-09-40.216).
Par ce rappel, les juges de la Cour de cassation vont dans le même sens que d’autres décisions rendues en la matière, notamment le cas où ils avaient décidé de ne pas accepter la nullité d’un licenciement en dépit de l’existence d’un harcèlement moral dès lors que le motif sur lequel se fonde l’employeur pour prononcer ce licenciement est sans rapport avec celui-ci (cf. Cass. soc., 09 avril 2015, n-13-27.624).
Deux situations possiblement acceptées
En l’espèce, les juges de la Chambre sociale de la Cour de cassation ont précisé qu’à défaut de lien causal entre le licenciement et le harcèlement moral, il existe deux situations. Ainsi, tout d’abord, si le motif disciplinaire dont fait en effet état l’employeur et si celui-ci est à la fois réel et sérieux, dans ce cas le licenciement doit nécessairement être approuvé. Ensuite, pour le cas où ce même motif n’est pas établi, le licenciement devra être qualifié de licenciement sans cause réelle et sérieuse mais celui-ci ne sera pas nul.
Il est important de souligner le fait que l’absence de nullité de ce licenciement n’empêche en rien le salarié d’exercer son droit de réclamer des dommages et intérêts sur le fondement du harcèlement moral que celui-ci a subi.
Références
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000051464969?init=true&page=1&query=24-11.421&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000045391810
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006900820