RGPD Règlement Général sur la Protection des Données, droit à l'oubli, arrêt Google +B22Inc., arrêt Google Spain, droit à la vie privée, CNIL Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés, arrêt Google LLC vs CNIL, arrêt du 28 juin 2018, trace numérique, Charte des droits fondamentaux, CEDH Convention Européenne des Droits de l'Homme
À l'heure où l'information circule instantanément et de manière quasi indélébile sur Internet, le passé numérique d'un individu peut le poursuivre indéfiniment. Il suffit d'une recherche sur un moteur comme Google pour faire resurgir des informations personnelles, parfois obsolètes ou préjudiciables, bien des années après leur publication. Cette réalité soulève une question essentielle : un individu a-t-il le droit de faire disparaître certaines informations le concernant ? C'est tout l'enjeu du droit à l'oubli, apparu progressivement dans le droit européen pour tenter de concilier liberté d'expression, droit à l'information et respect de la vie privée.
Le droit à l'oubli peut être défini comme la possibilité, pour une personne, d'obtenir le retrait ou le déréférencement de données personnelles la concernant lorsque leur présence en ligne n'est plus justifiée par l'intérêt public. S'il est aujourd'hui reconnu notamment par le Règlement général sur la protection des données (RGPD), sa mise en oeuvre soulève des difficultés juridiques, techniques et éthiques, tant les enjeux du numérique bousculent les principes traditionnels du droit.
[...] Ce compromis entre la protection de la vie privée et l'accès à l'information a été renforcé par la jurisprudence, comme en témoigne la décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 24 septembre 2019 dans l'affaire C-507/17 (Google LLC contre CNIL), où la Cour a estimé que le droit à l'oubli ne s'étendait pas au niveau mondial. Cela signifie que les moteurs de recherche ne sont pas tenus de supprimer les informations de leurs résultats à l'échelle globale, mais seulement dans les versions européennes de leurs services. La Cour a ainsi mis en avant l'intérêt du public à accéder à des informations jugées pertinentes, tout en reconnaissant qu'une telle exigence géographique permet de respecter la spécificité des droits européens. Cette décision marque un point d'équilibre entre le droit à la vie privée et l'accès à l'information. [...]
[...] La liberté d'expression et d'information, un contrepoids fondamental L'une des premières libertés à être mise en balance avec le droit à l'oubli est la liberté d'expression et d'information. Cette dernière est protégée par l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). Ces dispositions garantissent à chaque individu le droit de recevoir et de diffuser des informations, et elles sont considérées comme des piliers essentiels de toute société démocratique. Le droit à l'oubli, quant à lui, peut constituer une limitation de cette liberté en supprimant des informations d'Internet. [...]
[...] c. Allemagne), la CEDH a affirmé que les informations exactes concernant des faits d'intérêt public ne peuvent être effacées que dans des conditions strictes. Cette décision est particulièrement importante car elle rappelle qu'un simple droit à l'oubli ne peut pas conduire à un effacement automatique du passé. Les informations publiées qui ont un impact sur la vie publique ou qui sont d'intérêt collectif doivent être préservées, même si elles concernent des événements privés ou ayant eu lieu dans le passé. [...]
[...] L'apport majeur de cet arrêt réside dans la reconnaissance d'un droit subjectif à l'effacement, rattaché aux articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux, qui oblige les moteurs de recherche à déréférencer certains contenus à la demande des individus. Il a ouvert la voie à une approche personnalisée du traitement des données personnelles, où l'écoulement du temps devient un critère essentiel d'appréciation de la légitimité de leur maintien en ligne. Ainsi, le droit à l'oubli s'est progressivement affirmé comme une composante essentielle de la protection de la vie privée à l'ère numérique. [...]
[...] Cette régulation ambitieuse illustre la volonté de l'Union européenne d'affirmer sa souveraineté numérique et de replacer l'individu au c?ur de l'économie des données. II. Un droit encore fragile, confronté à des limites juridiques, techniques et pratiques Bien que le droit à l'oubli soit inscrit dans le cadre juridique européen, sa mise en ?uvre dans l'univers numérique soulève des difficultés considérables. Entre obstacles techniques, enjeux économiques et tensions avec d'autres libertés, son application reste complexe. Cette partie analysera d'abord les défis pratiques auxquels font face les individus pour exercer ce droit puis se penchera sur les défis rencontrés par les entreprises, notamment les moteurs de recherche et réseaux sociaux, dans leur mise en conformité A. [...]
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